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11 mars 2025 2 11 /03 /mars /2025 10:37

Alfred Pellon, La Femme dans les nuages, gravure sur bois.

Très intéressante soirée proposée par Lesarts57 en partenariat avec l’association Echange & Culture de Longeville-les-Metz, et présentée par M. Laurent Commaille, chercheur en histoire contemporaine. La salle se remplit petit à petit. Environ 50 personnes sont présentes à 20h, pour le mot d’accueil de Mme Astrid Chapelain, vice-présidente d’Echange & Culture, qui rappelle le sympathique partenariat culturel entre les deux associations depuis 15 ans déjà. Mme Martine Ziegler remercie tous les acteurs qui ont permis cette rencontre et trace le programme à venir, en particulier la 15e assemblée générale le 25 mars 2025, à Saulny.

 Au lendemain de la conférence « L’amorce d'une nouvelle école messine de peinture à l'aube du XXe siècle », le 27 février 2025, à Longeville les Metz.

Pour sa 12ème intervention avec Lesarts57, M. Commaille aborde le thème peu connu de l’école messine de peinture pendant la première annexion.

 

 

 

Cette image, souvent reproduite sur les brochures de la ville, et dont l’auteur inconnu pour la plupart d’entre nous, a été réalisée par Alfred Pellon, pourtant l’un des grands artistes de cette nouvelle école messine qui va émerger fin XIXe.

 

L’Ecole de Metz, ainsi nommée par Baudelaire, est à son apogée dans les années 1850 à 1870 avec de grands noms : Laurent Charles Maréchal, Auguste Migette, Auguste Hussenot. Migette, dont les tableaux historiques figurent au Musée de la Cour d’Or, habitait à Longeville-les-Metz justement mais sa maison a disparu.

Laurent-Charles Maréchal (1801-1887), Autoportrait, 1826. – Auguste Migette (1802-1884) peint par Auguste Hussenot (1798-1885).

Auguste Rolland, Aimé de Lemud, Théodore Devilly, Emile Knoepler, Emile Michel sont d’autres personnalités connues de l’Ecole de Metz. Influencés par le romantisme, le moyen-âge, la peinture du nord (Flandre, Hollande, Allemagne), ils admirent Victor Hugo, Eugène Delacroix, en particulier, pour le coloris, la touche de peinture et la composition.

Auguste Migette, Vue de Sierck. – Emile Knoepfler, Suzanne et les Vieillards.

L’Ecole de Metz disparaît peu à peu, en partie à cause de l’âge de ses membres, mais surtout à cause de la guerre de 1870. La défaite et le rattachement de l’actuelle Moselle à l’Allemagne entraînent l’exode d’une grande partie des artistes et des notables.  Ils partent pour Nancy, Bar le Duc, Paris. Hussenot et Migette restent, mais leur influence décline.

Théodore Devilly, les Adieux, 1885.

Entre 1870 et 1890, Metz est une petite ville de garnison militaire, peu attrayante. Vers 1890, la crainte d’une revanche française s’éloigne. Il faut se replacer dans le contexte de l’époque, une nouvelle génération née après 1870 arrive. L’Allemagne connait un prodigieux développement économique et démographique. Les villes s’agrandissent.

Salon des Lazard, rue Poncelet, Metz.

 

La nouvelle génération s’inscrit dans le système allemand, se pense ancrée dans le Reich, une nouvelle bourgeoisie messine se développe avec des familles aisées, Richthofen, Lazard, Mungenast... Mme Mungenast est une Lorraine originaire du pays de Bitche. En 1890, 25% des mariages sont mixtes entre Lorrains de souche et Altdeutschen. Cette émergence d’une bourgeoisie riche, cultivée et influente est importante pour le développement artistique.

 Les nouveaux artistes, nés en 1870 ont 20 ans en 1890. Il est intéressant d’observer leurs bornes chronologiques, mais aussi leur lieu de formation dans le système allemand. Au XIXe, jusque 1890, Düsseldorf est un haut lieu de formation artistique. Jugé trop conventionnel, il perd des son influence fin XIXe au profit de Munich.  

 

Henri Becke

1877-1954

Strasbourg

Jean Engel

1876-1960

Strasbourg  Munich

Émile Grub

1893-1983

Breslau

Jacques Hablützel

1868-1939

Munich

Anna Kaiser

1885-1942

Metz Strasbourg

Clément Kieffer

1881-1964

Strasbourg Düsseldorf

Lou Lazard

1885-1969

Munich

Edmond Louyot

1861-1919

Düsseldorf Munich

Albert Marks

1871-1941

Metz

Victor Mechling

1877-1928

Munich

Léon Nassoy

1873-1937

Nancy Munich

Alfred Pellon

1874-1947

Munich

Calixte Rémy

1868-1935

Berlin

Wilhelm Reue

1893-1962

Metz Munich

Edmond Rinckenbach

1862-1902

Munich Paris

Düsseldorf, Kunstakademie, 1879 – Munich, Akademie der Bildenden Künste, 1900.

Le bâtiment de l’académie des beaux-arts de Munich est très impressionnant en 1900 et encore imposant actuellement. C’est le lieu où s’est développé l’expressionnisme allemand et les débuts de l’abstraction avec Kandinsky.

 

Edmond Louyot, Autoportrait.

 

Edmond Louyot est le plus ancien, avec Rinckenbach, des peintres du groupe. Né dans une famille d’agriculteurs à La Lobe, sur la commune d’Arry, il semblait destiné à la prêtrise mais sa passion du dessin l’orienta autrement. Après un séjour à Karlsruhe, à l’École des arts et métiers et un autre à Munich, il effectue son service militaire comme volontaire et obtint ensuite une bourse de l’État pour suivre une formation à Düsseldorf puis Munich. Il passe l’essentiel de sa vie d’artiste à Munich mais exposa et vendit à Metz. Épuisé, malade, il rentre à Arry en 1919 et y décède peu après, en 1920.

Edmond Louyot, Les Lavandières au bord de la Moselle. -- La Moisson à Arry, 1909. – Dans la profondeur des bois, 1919.

Une exposition à Montigny-lès-Metz lui a récemment rendu hommage. Facture classique dans la touche, la couleur et la composition sur la toile des Lavandières, le blanc y est impressionnant sur des bleus très forts. Le paysage de la vallée de la Moselle dans la Moisson à Arry la montre moins boisée qu’actuellement. Et sur le Canal en automne, la touche de peinture épaisse, pas diluée, produits de jolis effets de matière. Dans la profondeur des bois est un de ses derniers tableaux (1919).

Canal en automne.

Bien que né à Barr, dans le Bas-Rhin, Edmond Rinckenbach, à l’approche de la trentaine se fixe à Metz et s’établit dans l’ancien atelier de Hussenot, rue aux Ours. Il en fait le centre de la vie picturale messine, attirant les nouveaux artistes émergents.  Dans ce tableau, il montre la population messine à l’époque charnière. Le Café du Globe, situé 3 rue des Clercs à Metz, était un lieu d’échange et de rencontre des artistes.

Edmond Rinckenbach, Le Café du Globe, 1890.

Il fonde la revue Jung Lothringen - La Lorraine moderne - mais meurt prématurément en 1902, laissant la revue en plan. La revue publie des textes, des poésies, dans les deux langues, certains en allemand et d’autres en français Elle ouvre ses pages à des artistes comme Heinrich Beecke, Victor Mechling, Alfred Pellon.

  

Grande maîtrise du crayon lithographique. Une grande sensibilité se dégage de ce portrait maternel, et du Pierrot qui regarde la cathédrale.

 

Edmond Rinckenbach, Lieb Mutterlein, crayon lithographique, 1902.

 

La nouvelle école messine se place dans le sillage de la précédente, rendant hommage, dans la revue, à de prestigieux membres de l’École messine passée, Laurent-Charles Maréchal et Auguste Migette. Les portraits les représentent âgés, ce qui l’inscrit dans la continuité.

 

Si Rinckenbach reste très « classique » dans son expression, il est suivi par de jeunes artistes influencés par les nouvelles tendances. Il y a déjà comme de l’expressionnisme, avant l’heure, dans ce portrait de Victor Mechling. Tout l’esprit torturé de l’artiste semble s’y refléter.

Victor Mechling, Das Irrlicht, Le Feu follet.

 

Alfred Pellon est sans doute, dans les années1900-1914, le plus doué des artistes messins. Son travail montre l’influence très nette qu’a eu le Jugendstil, l’art nouveau, sur lui. Il grave des bois dans le style des gravures viennoises, jouant sur les oppositions de noir et de blanc qui donnent beaucoup de vigueur, au point que ses dessins s’apparentent à ses gravures.

 

Ce qui caractérise en grande partie l’expression des artistes messins et « mosellans » du début du siècle, c’est l’importance de leur enracinement. Léon Nassoy, par exemple, s’il est allé étudier à Munich, va se consacrer à des œuvres reflétant la vie lorraine traditionnelle.

Léon Nassoy, Intérieur de cuisine à Craincourt, 1913.

 

Jean Engel, inconnu du grand public, a passé presque toute sa vie dans son village de Rustroff. Professeur de dessin à Sierck, il s’est spécialisé dans la peinture religieuse. Il a ainsi décoré plus de 200 églises en Moselle et en Allemagne. Une jolie fresque est visible dans la petite église Sainte Ségolène de Rustroff, au pays des trois frontières.

Le plus connu de ces artistes est incontestablement Clément Kieffer. Il incarne aussi une certaine continuité entre Alfred Pellon et Jean Morette. Ses gravures sont influencées par la vie lorraine, il fut un maître pour Jean Morette. Un espace lui est dédié à Varize.

Clément Kieffer, Saules.

Mais il y a aussi Albert Marks dont Marius Muselet disait : « Bien rares sont les foyers messins qui ne possèdent pas un Marks ». Dès 1895, il acquiert une certaine notoriété et triomphera lors du Kunstverein de 1905 (Exposition des artistes indépendants lorrains). Ses vues du St Quentin sont nombreuses, pente un peu exagérée mais couleurs fondues, effet de brume délicat. Il continue à peindre après la guerre et atteint son apogée dans les années 1920.

En marge de ces artistes, les sœurs Lazard, appartenant à la bourgeoisie juive de Metz, ont une renommée internationale, dépassant les limites de la Moselle et de l’Allemagne. Elles ont un réseau important, voyagent beaucoup, connaissent Munich après 1906 avec l’avènement du Blaue Reiter et les premières abstractions de Kandinsky.

Lou Lazard, Berliner Straßenszene, 1924. -- Ilse Heller-Lazard, Dresdner Hbf, 1914.

Cette amorce d’Ecole messine et mosellane a connu un effacement des mémoires dont les causes sont multiples :  la première sans doute liée à la situation historique 1870 -1918, et un rejet après 1918 de ce qui a été trop lié à l’occupation allemande. De plus ces artistes sont à l’écart des grands courants, impressionniste, fauve, … de ce qui se passe à Paris. En outre, de par leur origine sociale souvent modeste, ils manquent de « réseau » : le père de Pellon était tailleur de pierre, celui de Louyot, agriculteur, contrairement à des Monet ou Degas par exemple, qui bénéficient de liens sociaux et de réseaux importants.

 

Pellon rejette le retour de la Moselle à la France, il va continuer à vivre dans le monde germanique, et travaillera en Allemagne. Esprit trop indépendant pour se plier à un moule quelconque. Choix volontaire ou expulsé ??  Il sera néanmoins un peu un artiste maudit en France.

A. Pellon, Offenburg, 1919.

Aujourd‘hui, à l’exemple de la gare de Metz si longtemps mal considérée, ces artistes rencontrent une certaine reconnaissance et un intérêt du public. Pellon a bénéficié d’un article dans la revue éditée par les bibliothèques de Metz en 2014, Ilse Heller-Lazard et Edmond Louyot ont été exposés au Château de Courcelles à Montigny les Metz en 2018 et 2024.  Louyot est connu et apprécié dans le Massachussetts (U.S). Le musée de la Cour d’Or a déjà accroché des toiles de certains de ces artistes, d’autres sont encore dans les réserves.

Passionnant, comme toujours, Laurent Commaille nous fait prendre conscience de ce contexte compliqué pour ces artistes dans la Lorraine du début XXe où les jeunes lorrains sont citoyens allemands. La présentation de ce sujet original a ensuite généré des nombreux et intéressants échanges avec le public.

Prochaines rencontres avec Les Arts 57 :

Mardi 25 mars 2025 à 17h,

15e Assemblée Générale,

salle polyvalente de Saulny.

 

Le 29 avril, 20h, « Georges Méliès et les arts de son temps »,

présentée par Caroline Renouard,

salle polyvalente de Saulny.

 

Réservation obligatoire par mail ou par tél.

lesarts57@gmail.com   ou     03 87 32 05 03 

 blog : https://lesarts57.over-blog.

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6 février 2025 4 06 /02 /février /2025 14:28

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Plan-relief de la ville de Metz.

Première rencontre de l’année organisée par Lesarts57 dans ce haut lieu de la culture messine pour admirer le grand plan relief de la ville, et en profiter pour revoir sommairement des trésors antiques.

Vendredi 24 janvier, 14h30, sympathiques retrouvailles, il est encore temps de se souhaiter le meilleur pour 2025. A 15h, Marlène, médiatrice au musée, conduit le groupe de 28 personnes jusqu’à la salle dédiée.

Ce plan-relief est installé au musée depuis les journées du patrimoine le 16 septembre 2023. C’est une copie de l’original conservé dans les réserves des Invalides à Paris. L’original avait été exposé en 1984 dans la crypte de la cathédrale. Malgré la volonté de J.M. Rausch, maire de la ville, il n’a pas été possible de le conserver à Metz. Il demande alors à deux maquettistes M. Marcel François et M. Raymond Louis d’en faire une copie. Aidés par M. Bernard Mittelheisser, ils y travaillent pendant une dizaine d’années de 1990 à 2000, multipliant les voyages aux Invalides pour consulter les plans originaux.

 

Très impressionnant, lorsqu’on pénètre dans la salle, le plan-relief mesure 6,10m x 5, 35m. Agencé sur 17 tables, il couvre une surface de 32,6 m2, pèse 1800 kg avec plus de 4000 édifices et 12 000 arbres. Ils ont commencé par le centre-ville. Le bois utilisé provient de marronniers abattus sur l’Esplanade et il a nécessité l’utilisation de contreplaqué, de sable, de vernis …

Les plans-reliefs résultent d’une idée de Vauban. En charge de la défense du royaume sous Louis XIV, il fait construire des plans-reliefs d’abord des villes du nord, puis commande ceux des villes frontalières de façon à ce que les états-majors des armées aient une idée précise de la configuration des villes, de leurs forces et de leurs faiblesses. La collection royale des plans s’enrichit au fur et à mesure de la réalisation des fortifications.

 

Le premier plan-relief de Metz a disparu au cours d’un incendie. Le plan-relief suivant, original construit en 1826, à l’échelle 1/600e représente l’état de la ville à cette époque mais n’a cessé d’évoluer jusque 1850. Dernier bâtiment construit vers 1845-50, la caserne Ney y figure.

 

Excellente source d’information de l’état de la ville avant l’annexion de 1870, le quartier impérial, la gare actuelle, le temple… n’existent pas encore. Par contre, on y voit l’ancienne gare en bois incendiée en 1872.

 

On reconnait les quartiers anciens, traces du faubourg médiéval, près de la cathédrale, la place st Louis, les rues adossées aux murs des remparts …  Première évolution de l’enceinte du 13e , le Retranchement de Guise avec courtine et bastion (en forme de flèche) entre l’actuel boulevard Paixhans et boulevard de Trèves. En 1552, François de Guise signale au roi que l’enceinte de la cité est fragile, et qu’il faudrait la doubler d’un rempart. Puis apparait la Citadelle (détruite en partie début 19e) avec l’Arsenal, le Magasin aux vivres.

Retranchement de Guise --- Restes de la Citadelle : Arsenal, Magasin aux vivres.

Vauban a laissé les plans à Cormontaigne : une double couronne est construite, il ajoute des ouvrages avancés, redoutes ou lunettes renforçant la protection des portes : porte des Allemands, porte st Thiébaut…. La rue des tanneurs est bien reconnaissable.

Double couronne -- Rue des tanneurs, porte des Allemands.

Début 18e, sous l'impulsion du duc de Belle- Isle, on construit des casernes à Metz. Auparavant les soldats étaient logés chez l'habitant. La ville de 40 000 habitants devait héberger 20 000 militaires ! L’évêque de Metz, Mgr de Cambout de Coislin en finance deux sur ses propres deniers. Louis XIV lève un impôt sur le marc de raisin pour financer la construction de casernes, Chambière, Fort Moselle…. Le rez de chaussée réservé aux chevaux tandis que les hommes logent aux étages et les officiers dans les pavillons. Caserne et stockage de matériel ne sont plus seulement à l’Arsenal mais répartis dans différents endroits pour la défense de la ville.

Fort-Moselle (place de France) --- Chambières.

 

Guidés par Marlène dans les passages sinueux du musée, nous remontons le temps jusqu’aux salles gallo-romaines. Le musée est installé sur l’emplacement d’un ensemble thermal. Des fouilles, des études par archéomagnétisme permettent d’établir de nouveaux plans, de mieux lire les lieux : sur les 3 ha du complexe thermal de l‘ilot Ste Croix seulement 20% sont connus. Il existait deux complexes parallèles un pour les hommes, un autre pour les femmes.

Les vestiges des murs gallo-romains, restaurés en 2024, laissent bien apparaitre leurs caractéristiques : la double paroi réalisée en petits moellons liés par un mélange de sable et de chaux et le chaînage de briques rouges.

Thermes gallo-romains : hypocauste - Conduit d’évacuation des eaux.

On peut admirer les vestiges d’un hypocauste (système de chauffage par le sol) et une galerie souterraine servant à évacuer les eaux des bassins et parfaitement conservée sur une vingtaine de mètres. L’eau circulait dans la rigole, les parties surélevées permettait le passage des personnes chargées de l’entretenir. Les bassins étaient approvisionnés en eau depuis Gorze par l’aqueduc de Jouy. (voir article aqueduc, mai 2016).

Cette salle est consacrée aux arts du feu. Il existait plusieurs ateliers de céramique dans la région.  Celui de Chémery a livré de nombreux objets, certains portent la signature des potiers Saturninus et Satto. Ils auraient œuvré de la fin du Ier au milieu du IIe siècle. Les poteries sigillées d’une belle couleur orangé sont obtenues grâce à un engobe (sorte de vernis argileux) riche en oxyde de fer et une cuisson dans des fours où l’apport d’oxygène a été amélioré (cuisson oxydante). Les poteries noires étaient obtenues en étouffant l’apport d’air dans le four (cuisson réductrice). Les cuissons s’effectuaient de mars à octobre pour limiter la consommation de bois.

De jolis objets en verre, provenant souvent de tombes, sont exposés. La fabrication du verre utilisait comme matière première, du sable riche en silice, auquel on ajoutait du natron et de la chaux.  Le natron provenait du Liban ou d’Egypte, il était rare, ce qui explique que le verre ait été souvent recyclé, les morceaux cassés refondus. La production locale de perles, de vases, de récipients montre un savoir-faire étonnant : des fils de verre rapportés, des pastilles colorées incluses dont la technique s’apparente au fusing moderne, le verre soufflé dans des moules, ou masques, … Les différentes nuances de couleurs peuvent aussi provenir du fondant utilisé par exemple la cendre de fougère, la potasse.

La salle suivante consacrée au décor de la maison montre des mosaïques, une sur le mur, une autre au sol. Nombreux motifs géométriques réalisés avec des petites tesselles en céramique, terres cuites, ou morceaux de verre. Un décor mural nécessite de nombreuses couches d’apprêt : une première épaisse de cailloux, une seconde plus fine de sable, jusqu’à la dernière de 1 mm contenant les pigments. Le noir obtenu avec du charbon de bois, le rouge avec du cinabre ou à partir de murex concassé. Le travail s’effectue de haut en bas.

 

 

Une stèle découverte à Norroy-les-Pont-à-Mousson est particulièrement intéressante : le personnage sculpté porte une ceinture à lanières de cuir. Or, une seule profession portait cet accessoire : les conducteurs de char ou auriges. Ils s’occupaient des chevaux, entretenaient les écuries et devaient être athlétiques pour remporter les courses.

Les romains appréciaient particulièrement les jeux du cirque. La matinée réservée à la chasse aux animaux sauvages, l’après-midi aux combats de gladiateurs.  « Aucun sang ne devait être versé dans la cité », l’amphithéâtre était situé à l’extérieur de la ville de l’époque. (Actuellement près du Centre Pompidou, enfoui sous 7 à 8m de remblai).

La belle mosaïque aux gladiateurs, découverte place Coislin, renseigne précisément sur leurs armes.  Certains étaient célèbres à leur époque, leurs noms apparaissent : Sen?ianus et Prudens. Il existe une vingtaine de types de gladiateurs, ceux armés lourdement : secutor portant casque, bouclier, glaive, rétiaire muni d’un filet et d’un trident, d’autres plus légerement : thrace et mirmillon. Ils étaient esclaves, prisonniers de guerre ou citoyens. Les combats obéissaient à des règles. (Voir art. Grand, juin 2019).

Mosaïque II--IIIe siècle, découverte en 1969, place Coislin, Metz.

Continuons à remonter le temps, Marlène nous présente quelques divinités anciennes.

Autel à Cybèle mis à jour lors des travaux d’extension du parking place de la République en 2008. Il est sculpté sur trois faces et représente une procession en l’honneur de Cybèle avec prêtres, musiciens et un lion personnalisant la déesse. Originaire d’Asie, le culte de Cybèle, déesse-mère se diffuse dès le 1er siècle apr J.C. Le rituel consistait à asperger les objets consacrés avec le sang d’un taureau que l’on venait d’égorger.

Prêtre couronné de lauriers aspergeant les objets – Autel taurobolique, 199 apr J.C. , réemployé dans les fortifications.

 

Isis, déesse égyptienne, gardienne de la famille. Son culte atteint la Grèce puis l’ensemble du monde méditerranéen. Des temples d’Isis se développent en Gaule où sont cantonnées les légions. Découverte en 1841 à l’emplacement de la Citadelle à Metz, elle porte un vêtement retenu par un nœud (tit) sur sa poitrine, symbole de fertilité. La tête est manquante, elle devait avoir été sculptée à part et fixée par un tenon.

Isis, IIIe siècle.

Relief de Mithra, Sarrebourg, II-IIIe s. découvert au XIXe s.

 

Dans la caverne, Mithra égorge le taureau, symbole de fécondité et source de régénération de la nature. Le sang imprégnera la terre, favorisera une abondante végétation. Dieu de la lumière, il commande au jour et à la nuit comme en témoignent les chars du soleil et de la lune et les porteurs de torche de part et d’autre. Torche baissée pour le lever du jour, la torche levée annonce la fin du jour. Originaire du Proche-Orient, de Perse, Mithra associé au dieu Sol est attesté, début du IIe, diffusé par les marchands et militaires.

 

Schéma du mithraeum --- Buste du dieu Sol, II-IIIe.

Le dieu Mithra est placé dans un décor d’architecture dans lequel l’encadrement est composé de petites scènes. Les montants racontent sa vie. Le linteau évoque l’assemblée des divinités romaines où il prend place avec Mercure, Mars, Jupiter, Hercule, Neptune, Bacchus … Tout à gauche, Mithra est représenté, décochant une flèche vers un rocher pour en faire jaillir une source. Une mosaïque découverte à Ostie (près de Rome) renseigne sur le culte à Mithra, culte à mystère, il fallait être coopté pour y entrer. Sans doute saccagé par les chrétiens au cours de violentes confrontations avec les polythéistes entre 200et 300 apr J. C.  Une dédicace indique le nom du généreux commanditaire du monument de Sarrebourg : Marceleus Marianus.

 

Omniprésents dans leur vie quotidienne, les Romains honorent plusieurs dieux dont certains liés à ceux des Grecs. Les divinités sont associées aux jours de la semaine : Diane pour le lundi, Mars le mardi, Mercure le mercredi, Jupiter le jeudi, Vénus le vendredi, Saturne le samedi, Apollon, symbole du soleil pour le dimanche, la 8 ème face porte une dédicace à Jupiter « Le plus grand, le meilleur ».

Bloc aux divinités de la semaine, II-IIIe, Havange.

Venus : miroir – Jupiter : sceptre et foudre -- Apollon : couronne solaire sur la tête -- Mars : cuirasse, bouclier, lance -- Mercure : caducée.

 

Les vestiges témoignent des cultes rendus aux divinités romaines classiques, Mercure, Jupiter mais aussi aux dieux celtiques comme la déesse gauloise Epona. Souvent représentée à cheval, elle est appréciée des gens de la terre, mais aussi des militaires, des commerçants qui se déplacent. Elle joue aussi le rôle de psychopompe accompagnant les défunts dans leur voyage vers l’au-delà.

 

Stèle de Mercure, dieu des voyageurs et du commerce associé à Rosmerta, déesse celte de la fertilité et de l’abondance, I-IIIe siècle. Peu à peu les dieux romains remplacent les dieux celtes. A partir du IIe siècle, ils seront progressivement concurrencés par les divinités orientales puis par le christianisme au siècle suivant qui entrainera la destruction des représentations expliquant parfois l’absence de tête. 

 

 

La petite salle cylindrique, dédiée à l’original de la colonne de Merten, le Cavalier à l’Anguipède, permet de mieux admirer, à hauteur d’homme, les différentes parties de la colonne en particulier le sommet. Elle est présentée en trois parties. Le plafond bleu nuit rappelle la voûte céleste, domaine de Jupiter.

C’est en creusant un puits dans son jardin, qu’un habitant de Merten découvre les nombreux fragments de la colonne dans une fosse, en 1878. Une réplique est réalisée en 1988 pour être installée à l’entrée de la rue Serpenoise. Le moulage à base de sable alsacien et de chaux un peu grossier essaie de restituer l’aspect originel du grés rose. Actuellement les méthodes de restauration ont progressé et doivent être réversibles.

 

Au sommet le groupe de Jupiter : à cheval, il terrasse un géant anguipède, mi-homme, mi-serpent. Le Cavalier à l’Anguipède peut aussi être assimilé au dieu gaulois Taranis, maître de la foudre et des phénomènes naturels.

Le chapiteau présente les visages des 4 saisons qui symbolisent le renouvellement du temps : jeune homme pour le printemps, épi de blé pour l’été, raisin pour l’automne, vieille femme pour l’hiver.

La base quadrangulaire comporte les bas-reliefs de Minerve, Junon, Apollon, et Hercule. Le bloc octogonal, devait présenter les divinités de la semaine et pour la 8e face une Victoire romaine.

Colonne de Merten, musée de la Cour d'Or, Metz
Colonne de Merten, musée de la Cour d'Or, Metz
Colonne de Merten, musée de la Cour d'Or, Metz
Colonne de Merten, musée de la Cour d'Or, Metz
Colonne de Merten, musée de la Cour d'Or, Metz
Colonne de Merten, musée de la Cour d'Or, Metz

Colonne de Merten, musée de la Cour d'Or, Metz

On connait de nombreux exemples de colonnes retrouvées dans la grande région mais la hauteur de celle de Merten est exceptionnelle (12 m pour l’original). Certaines étaient situées en zone rurale, près de hameaux ou domaines agricoles et avaient peut-être un rôle protecteur (Taranis). Pour d’autres, assez nombreuses, situées près des frontières, c’était plutôt un Jupiter, repère pour les légionnaires.

Rites funéraires. Ils sont de deux types : incinération ou inhumation.

Les corps des défunts étaient brûlés sur des bûchers hors de la cité, les cendres placées dans des urnes en céramique, en verre, dans des cuves en pierre, recouvertes de stèles pour les plus riches. Urnes en grès ou terre cuite, IIIe-IVe.

 Le musée renferme une magnifique collection de monuments funéraires. Les nécropoles de Divodurum  étaient  situées en dehors du centre urbanisé, le long des principales voies de communication sur les territoires actuels du Sablon et de Montigny-lès-Metz.

Tombe à incinération à double cavité, IIe --- Sarcophage en plomb, Sablon, III-IVe.--1903-05.

Au IVe siècle, l’implantation de la religion chrétienne, va développer des rites avec inhumation dans des sarcophages. Certains en plomb, différents de ceux de la région d’Amiens, furent fabriqués localement. Les stèles funéraires renseignent bien sur la vie des habitants, mais bon nombre ont été retaillées, réemployées dans des constructions ultérieures, les remparts par exemple. ​​​​​​​

Urne cinéraire, onyx, Ier s. apr. J.C.

 

Objet magnifique, précieux, cette urne en onyx était placée dans un caisson calcaire avec une urne calcaire, découverte à Metz. Exceptionnelle, un tel objet traduit l’appartenance à une élite aisée. Sa grande qualité esthétique et le matériau utilisé trouve sans doute son origine en Egypte.  La formation, en cercles concentriques au centre de la pierre, ressemble à un œil. Elle a sans doute été considérée comme un talisman aux pouvoirs magiques.  

Dernier espace très riche en petits objets témoignant de l’art de vivre des gallo-romains aux premiers siècles, des échanges commerciaux terrestres et maritimes, (amphores, huile, garum), des productions de bijoux (parures en bronze, en or) …, de l’importance des bains aux thermes dans leur vie quotidienne. La période gallo-romaine de Metz a atteint son apogée aux IIe et IIIe siècles.

Un grand merci à Marlène, passionnante et passionnée, pour cette visite guidée qui donne envie de revenir prendre le temps pour mieux admirer ces trésors antiques.

 

Prochaine rencontre avec Les Arts 57 :

« L'amorce d'une nouvelle école messine de peinture à l'aube du XXe »

Jeudi 27 février à 20 h, Centre social R. Henry, à Longeville les Metz.

Soirée présentée par M.  Laurent Commaille.

Réservation obligatoire par mail ou par tél.

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 blog : https://lesarts57.over-blog.fr

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15 janvier 2025 3 15 /01 /janvier /2025 10:29

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GIOTTO, La Nativité, 1304, Padoue, Chapelle Scrovegni.

 

Très jolie rencontre au musée de la Cour d’Or, présentée par Catherine Bourdieu, maîtresse de conférences à l'Université de Lorraine : « La crèche de Noël : histoire, représentations artistiques, et symboles. » Particulièrement bienvenue et attendue en ce mois de décembre 2024, elle a réuni 80 personnes confortablement installées dans le Grenier de Chèvremont, entourées de remarquables sculptures médiévales.

Quelques temps après la conférence « La crèche de Noël », au Musée de la Cour d'Or, le 14 décembre 2024.

 

14h30, après une rapide présentation des projets de l’association par Martine Ziegler, présidente de Lesarts57, puis l’accueil par Philippe Brunella, directeur du musée de la Cour d’Or, Catherine commence par une mise au point sur le vocabulaire lié à la naissance de Jésus.

La Crèche désigne la mangeoire dans laquelle le nouveau-né a été déposé, et par extension l’abri et les figures correspondant à cet épisode, tandis que La Nativité désigne les différents évènements autour de cette naissance.

1 Sources utilisées : les textes bibliques.

Deux Evangiles évoquent la naissance de Jésus : celui de Matthieu cite rapidement le lieu de naissance « Bethléem en Judée », par contre celui de Luc est plus précis. « … en ces jours-là, parut un édit de l’empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre, … Joseph quitta la ville de Nazareth en Galilée pour monter en Judée, à …Bethléem… se faire inscrire avec Marie, son épouse … enceinte. Or, pendant qu’ils étaient là, … elle mit au monde son fils … l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune. »

Josef von Fürich, L'arrivée de la Sainte Famille devant l'auberge de Bethléem. 1838. Berlin.

 

Scène très rare : Marie est assise sur l’âne, visiblement fatiguée. Joseph, qui, très poliment, a ôté son chapeau, est refoulé par le propriétaire de l’auberge. Derrière eux, une joyeuse compagnie d’hommes boivent et jouent de la musique sur une terrasse ombragée. L’architecture évoque un village ancien mais sans caractère moyen-oriental.

Une autre source, le Protoévangile de Jacques (IIe s.), rapporte que la naissance aurait eu lieu dans une grotte. Ainsi le lieu de naissance de Jésus est-il une étable ou une grotte.  L’étable devient parfois un édifice en ruine illustrant le dénuement de la Sainte Famille.

Nicolas Eeckman, L'âne et le bœuf. 1941, Lille.

 

La présence de l’âne et du bœuf se rapporte au Livre d’Isaïe. Le bœuf, animal pur, représente les juifs convertis au christianisme et l’âne, animal impur, représente les nations converties au christianisme. Ces deux animaux apparaissent dans divers textes, début du IVe s., puis dans les premières représentations artistiques. Peu à peu, on invente que le bœuf réchauffe l’Enfant de son souffle tandis que l’âne a porté Marie. En outre, ce sont des animaux probables dans une étable.

2 Les conventions de représentation.

Elles s’appuient sur des textes bibliques, sur des écrits relatant la vie des saints et sur des traités théoriques d’iconographie. Au Moyen Age, entre 1261 et 1266, Jacques de Voragine (dominicain et archevêque de Gênes) rédige en latin La Légende dorée, qui raconte la vie de saints, de martyrs, celle du Christ et de la Vierge pour les gens d’église. En 1570, le Traité des saintes images est rédigé par Johannes van der Meulen pour faciliter l’application du concile de Trente et fixer les normes de représentation des images. Marie ne doit pas être représentée pendant l’enfantement, Joseph doit être figuré comme un homme d’âge mûr et non comme un homme âgé. Il faut éviter la nudité de l’Enfant. L’âne et le bœuf peuvent être présents. Un autre traité, « Des Peintures sacrées » de Frédéric Borromée, 1624, proscrit la musculature athlétique des bergers qui leur donnerait trop d’importance ! Celui de Francisco Pacheco, « L’art de la peinture », 1649, recommande que l’Enfant soit enveloppé dans ses langes, que la Vierge et st Joseph se tiennent dans la grotte, avec l’âne et le bœuf, que les anges chantent et annoncent la naissance aux bergers.

3 La Nativité.

Elle correspond à un ensemble assez vaste de scènes : l’attente, l’épisode des sage-femmes, la Vierge allaitante, les différentes adorations (anges, bergers, mages). Jésus est tantôt l’Enfant nourrisson, tantôt l’Enfant divin.

L’attente de la naissance. Le thème de la Visitation dans lequel Marie rend visite à sa cousine Elisabeth, elle aussi enceinte, est bien connu. Cependant les représentations de Marie avec le ventre de la grossesse sont moins fréquentes : que ce soit les deux cousines posant leur main sur le ventre l’une de l’autre, la robe fendue au milieu, plus rare, l’Enfant visible en elle, ou encore Marie allongée juste avant la naissance.

Rogier van der Weyden, La Visitation --- Antonio Veneziano, Madonna del Parto --- Piero della Francesca, Madonna del parto --- Vierge parturiente - basilique St-Julien de Brioude.
Rogier van der Weyden, La Visitation --- Antonio Veneziano, Madonna del Parto --- Piero della Francesca, Madonna del parto --- Vierge parturiente - basilique St-Julien de Brioude.
Rogier van der Weyden, La Visitation --- Antonio Veneziano, Madonna del Parto --- Piero della Francesca, Madonna del parto --- Vierge parturiente - basilique St-Julien de Brioude.
Rogier van der Weyden, La Visitation --- Antonio Veneziano, Madonna del Parto --- Piero della Francesca, Madonna del parto --- Vierge parturiente - basilique St-Julien de Brioude.
Rogier van der Weyden, La Visitation --- Antonio Veneziano, Madonna del Parto --- Piero della Francesca, Madonna del parto --- Vierge parturiente - basilique St-Julien de Brioude.
Rogier van der Weyden, La Visitation --- Antonio Veneziano, Madonna del Parto --- Piero della Francesca, Madonna del parto --- Vierge parturiente - basilique St-Julien de Brioude.

Rogier van der Weyden, La Visitation --- Antonio Veneziano, Madonna del Parto --- Piero della Francesca, Madonna del parto --- Vierge parturiente - basilique St-Julien de Brioude.

Les sages femmes.

L’épisode apparait dans les Evangiles apocryphes (non reconnus par l’église). Saint Joseph était parti chercher une sage-femme pour aider Marie ; mais à leur arrivée, elle avait déjà enfanté.

 

 

Jésus est né, Marie est agenouillée, les mains jointes. Les anges chantent, l’âne et le bœuf veillent. A gauche, Joseph arrive accompagné d’une sage-femme. Au loin, un berger.

Martin Schongauer, La Nativité, 1480-1490. Louvre.

Robert Campin, La Nativité, 1420-26, Dijon.

Commandé par Philippe le Bon, duc de Bourgogne, ce tableau représente la Sainte Famille, les anges, et par la fenêtre, l’adoration des bergers. Le bœuf et l’âne sont derrière un torchis qui se délite. La Vierge est parée d’un très beau manteau aux plis soigneusement représentés. Sur la bordure est brodée la prière du salve Regina. L’enfant nu, posé sur le sol, rayonne d’une lumière divine. Joseph tient un cierge allumé dont il protège la flamme. Les 3 anges tiennent un phylactère sur lequel est inscrite l’expression latine signifiant : « Gloire à dieu aux plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté… ». A droite, les deux sages-femmes vêtues de robes somptueuses. Zelemi, de dos, convaincue de la virginité de Marie tient un phylactère « Une vierge a enfanté ! » tandis que Salomé, debout de face, sceptique, montre sa main droite qui se paralyse, celle avec laquelle elle a voulu vérifier l’état virginal de Marie. L’ange au-dessus d’elle tient un autre phylactère signifiant « Touche l’Enfant et tu seras guérie. ».

Jacques Daret, la Nativité, 1434-35, Madrid.

Dans cet autre tableau Daret, élève de Campin, reprend de nombreux éléments  interprètés différemment. L’architecture en bois au toit de chaume endommagé, l’âne et le bœuf regardent l’Enfant, les quatre anges sur le toit, saint Joseph tenant le cierge allumé, porte à sa ceinture une bourse, un couteau. Salomé est agenouillée, ses mains pendantes. Zelemi et l’ange lui montrent l’Enfant. Le peintre dote les personnages de nombreux attributs : Zelemi possède un couteau, instrument de la sage-femme pour couper le cordon ombilical, un trousseau de clés. Ces clés symbolisent la virginité de Marie. Salomé porte une ceinture tressée évoquant un serpent et par extension, le péché originel, le couteau de la sage-femme et une longue ceinture qui se prolonge le long du dos et se termine par un nœud, référence à st Augustin qui reprend un symbole connu : dénouer sa ceinture = perdre sa virginité. Sur le toit, à droite, deux hirondelles annoncent le printemps, renouveau associé à la naissance, un chardonneret qui apprécie le chardon épineux, référence à la couronne d’épines. La tache rouge autour de sa tête annonce le sang versé par le Christ. Au loin, un ange annonce la naissance aux bergers.

Lorenzo Lotto, Nativité,1527-28, Sienne.

 

Etonnant et rare aussi, ce tableau de Lorenzo Lotto représente le bain du nouveau-né. La Vierge tient l’Enfant, c’est bien un garçon et le cordon ombilical coupé n’est pas encore tombé. Salomé a les mains crispées, elle n’a pas encore touché l’Enfant. Au premier plan un grand tissu prêt à envelopper le nouveau-né, différents pots en lien avec le bain, une tasse posée sur une pelle contenant des braises. En arrière-plan, à gauche, une femme accroupie (Zelemi ?) tient une grande pièce d’étoffe devant le feu d’une grande cheminée.

 

 

 

Ce relief met en scène l’arrivée d’une sage-femme. Elle entre par la porte et s’extasie devant le nouveau-né. De part et d’autre, l’âne, le bœuf, la mangeoire et au-dessus les bergers et les rois Mages.

Anonyme, Pays-Bas, Sage-femme dans l’étable, 1470-80, Louvre

La Nativité désigne aussi un épisode postérieur à la naissance et diversement représenté : Marie allongée avec l’Enfant, ou Marie, Joseph et Jésus seuls , accompagnés par des anges. Dans le thème de la Nativité, l’enfant est un nourrisson, dans la Sainte Famille, il est garçonnet.

Marie allongée.

Allongée, protégée par un auvent sommaire, Marie prend l’Enfant emmailloté que lui tend une femme. L’âne, le bœuf, la mangeoire apparaissent sur le côté, st Joseph assis sur le sol. Un ange fait l’annonce aux bergers.

Giotto, La Nativité, XIVe, fresque Padoue, chapelle Scrovegni.

 

 

 

La Vierge est allongée, la tête soutenue par un coussin se tourne vers l’enfant couché dans la mangeoire, la tête aussi soutenue par un petit coussin, elle lui tient la main. L’âne et le bœuf couchés devant sont en proportions réduites par le choix de la composition. Joseph est aux cotés de Marie et derrière lui l’ange fait l’annonce à un berger dont on voit les moutons.

Grés sculpté, XVe, Nativité avec annonce aux bergers, Los Angeles.

Marie, Joseph et Jésus seuls.

Carlo Maratta, La Sainte nuit, XVIIe, Dresde --- Guido Reni, Saint Joseph tenant l'Enfant Jésus dans ses bras, 1620, L’Ermitage.

 

Marie est seule, l’étable plongée dans l’obscurité. Elle tient Jésus au-dessus de la mangeoire et écarte ses langes, laissant rayonner la lumière divine à partir de l’Enfant. Le vif contraste avec la pénombre crée un magnifique clair-obscur. Trois têtes d’angelots ailés augmentent l’intimité et la spiritualité de cette très jolie scène.

Scène empreinte de sensibilité et de douceur : Joseph tient Jésus dans ses bras, bel échange de regards, la main tendue de l’Enfant, peut-être pour caresser la barbe. Il tient deux roses dans sa main gauche, allusion à un des symboles de la Vierge, la rose sans épine. Bel éclat coloré du manteau orange dans ce paysage naturaliste.

En famille.

Jésus dort dans les bras de Marie. Sainte Anne, la mère de la Vierge s’apprête à le couvrir. Derrière, un homme âgé regarde l’enfant et prie, sans doute saint Joachim le père de Marie. Le petit Jean Baptiste tente de toucher Jésus, sa mère, sainte Elisabeth, le retient par la ceinture et lui montre que Jésus est endormi. La Vierge le regarde avec calme mais fermeté en levant son index lui demande de se taire.

Charles Le Brun, Le sommeil de l'Enfant Jésus, XVIIe, Louvre.

A la lisière entre la scène religieuse et la scène de genre, ce tableau établit un lien avec la réalité du XVIIe siècle grâce à une réaction qui parait plus humaine que divine. D’autre part, le mobilier semble indiquer que la scène a peut-être lieu dans la maison de Nazareth, avec des salles en enfilade, cheminée et poutres au plafond.

Vierge allaitante.

L’église Saint-Martin de Metz abrite un ensemble remarquable en pierre datant du XIVe et sans doute peint à l’origine. Il fait partie d’un programme de recherche sur la sculpture en Lorraine et Champagne que Catherine coordonne. Dans le bras nord du transept, deux reliefs limitent une arcature gothique, à gauche un rideau fermé, à droite le rideau est ouvert sur une Nativité. Lors de l’enfantement, la Vierge est seule puisque Joseph est parti chercher une sage-femme. Il n’y a aucun témoin, le rideau est fermé sur ce mystère. De l’autre côté, à droite, la naissance a eu lieu, Marie est allongée, les épaules soutenues par un coussin. Devant elle, la mangeoire en osier tressé, encadrée par l’âne et le bœuf. Elle soulève l’Enfant qui tend les bras et s’apprête à téter. Les parois du fond, réalisées en faible relief, évoquent des panneaux de bois ajourés à la manière de claustra pour isoler la Vierge.

Eglise St-Martin, Metz - Transept nord, Nativité. XIVe.
Eglise St-Martin, Metz - Transept nord, Nativité. XIVe.
Eglise St-Martin, Metz - Transept nord, Nativité. XIVe.
Eglise St-Martin, Metz - Transept nord, Nativité. XIVe.
Eglise St-Martin, Metz - Transept nord, Nativité. XIVe.

Eglise St-Martin, Metz - Transept nord, Nativité. XIVe.

L’adoration.

L’adoration des anges. Purement spirituel, c’est un épisode inventé pour enrichir la révélation et la reconnaissance de la divinité de Jésus.

Dans un cadrage resserré sur les personnages, Marie dévoile le nouveau-né à deux anges adolescents qui se penchent dans une attitude naturelle, l’un les mains jointes, l’autre les bras croisés sur la poitrine. Joseph se tient derrière la Vierge. La lumière divine qui émane de L’Enfant perce l’obscurité de l’étable, tous les personnages sourient admiratifs.

Gerrit van Honthorst, Adoration de l’Enfant Jésus, 1620, Florence.

 

Le peintre Van Loo utilise les mêmes codes dans un style différent en ajoutant les rayons de lumière autour de la tête de l’Enfant et des têtes d’angelots ailés. L’interprétation de l’étable rend la scène spectaculaire : des piédestaux abîmés à gauche, des planches posées contre un bloc de pierre près de la Vierge. Au premier plan, la scie du charpentier et la selle.

Carle van Loo, L'adoration des anges, 1751, Brest.

L’adoration des bergers.

Elle est renseignée dans l’Evangile de Luc : « Dans les environs se trouvaient des bergers qui passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. L’ange du seigneur s’approcha, … leurs dit … aujourd‘hui vous est né un Sauveur… il est le Messie … vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire ».

Lorenzo Lotto, L’Adoration des bergers, 1534, Brescia.

 

Dans une salle rustique, l’âne et le bœuf au fond, st Joseph à droite. La Vierge est agenouillée sur la mangeoire où l’Enfant est allongé. Leurs dimensions imposantes font penser à une préfiguration du tombeau. A droite, deux grands anges accompagnent deux hommes qui apportent un agneau. Leur ressemblance fait référence à la commande de l’œuvre par deux frères. Jésus qui caresse l’agneau est également une préfiguration de la Passion du Christ.

Francisco de Zurbaran, L'Adoration des bergers, 1638-39, Grenoble.--- Nicolas Poussin, L’Adoration des Bergers, 1533-34, Londres

Zurbaran représente un concert céleste avec des anges musiciens et une chorale d’angelots. En bas de nombreux bergers debouts ou agenouillés apportent des offrandes : des œufs dans un panier et un agneau entravé, allégorie précise là encore.

Grand peintre classique, Nicolas Poussin crée une architecture antiquisante, le thème des ruines était très en vogue au XVIIe. Il place un auvent de fortune pour évoquer l’étable. Des bergers se prosternent devant l’Enfant. Les postures sont théâtralisées. Au- dessus, un cortège d’angelots, ils tiennent des branches fleuries.

Le Nain, L’Adoration des bergers, 1640, Londres.

 

Le Nain place, lui aussi, la scène dans une architecture de ruines antiques qui lui apporte de la monumentalité. Joli moment empreint de solennité. La tête du bœuf, très proche de l’enfant rappelle la tradition populaire de son souffle réchauffant le nouveau-né. L’âne, un peu plus loin, porte encore la selle, référence au voyage de Marie et Joseph pour arriver à Bethléem.

L’adoration des mages.

L’histoire des rois mages est évoquée dans l’Evangile selon st Matthieu : « Or, des mages venant de l’Orient arrivèrent à Jérusalem … Hérode fit secrètement appeler les mages … les envoya à Bethléem en disant …quand vous l’aurez trouvé, venez me le faire savoir pour que j’aille moi aussi lui rendre hommage … revoyant l’étoile …ils entrèrent dans la maison, virent l’Enfant avec Marie… et tombant à genoux, lui rendirent hommage. Puis ils … lui offrirent … de l’or, de l’encens et de la myrrhe ». Ces cadeaux représentent les trois natures du Christ : royale, divine, et humaine.

La plus ancienne représentation de la venue des rois mages se trouve à Rome, sur un mur de la chapelle grecque dans la catacombe de Priscilla. Toujours à Rome, dans le cimetière de l’église sainte-Agnès un vestige de sarcophage datant du IVe siècle montre leur arrivée avec les dromadaires, leurs offrandes et l’étoile.

Mages – Mosaïque, basilique St-Apollinaire le Neuf, Ravenne.

Cette magnifique mosaïque de la basilique St-Apollinaire le Neuf à Ravenne apporte d’autres détails : les costumes et bonnets phrygiens indiquent l’origine orientale. Les présents sont apportés dans des coupes ou vases précieux, peut-être en argent, le nom des mages : « Balthassar, Melchior, Gaspar ».  ils représentent aussi les trois âges de la vie : l’âge mûr portant barbe et cheveux bruns, la jeunesse, imberbe, et le plus âgé avec barbe et cheveux blancs.

Triptyque de Adoration des Mages, fin XVe, Cour d'or.

La scène centrale est sculptée, les scènes latérales sont peintes. Sur le volet de gauche, l’étoile contenant la figure de l’Enfant Jésus qui tient un Tau (croix de st Antoine) apparait aux rois mages. Au centre, les figures de l’adoration sont sculptées en haut-relief (pas détachées du fond). L’étable, traitée comme une salle en ruines laissant voir le ciel et le paysage à gauche, est pourvue d’un appentis protégeant la Vierge et l’Enfant. La composition astucieuse répartit les mages, et insère l’âne, le bœuf et la mangeoire dans le mur encore intact. Le volet de droite représente le massacre des Innocents. Grande finesse, détails délicats de la végétation peinte, une certaine correspondance entre les costumes et les coiffures des rois mages font de ce triptyque un ensemble remarquable.

4 la Crèche.

Giotto, L’Institution de la Crèche à Greccio, 1295, Assise.

D’après la légende, la tradition des crèches, est fondée par st François d’Assise. Il aurait visité la basilique de la Nativité à Bethléem et décidé de mettre en place une crèche vivante dans le village de Greccio durant la nuit de Noël 1223. Ce genre de spectacle existait en Europe à travers les Mystères, ces pièces de théâtre aux thèmes religieux, qui se jouaient devant les églises. Ce modèle de crèche vivante se développe alors en Europe au cours du XIIIe siècle. Saint François décide d’organiser la crèche vivante dans une grotte proche de Greccio dans l’intention de substituer au pèlerinage à Bethléem et Jérusalem, devenu dangereux, un pèlerinage en Italie. Peu à peu les crèches sous forme de figurines se multiplient dans les églises puis dans les familles.

Simone dei Crocifissi, Adoration des Mages, fin XIIIe, Eglise de la Trinité, Bologne.

Considérée comme la plus ancienne représentation de la Nativité, ces statues aux proportions réelles ont été taillées dans du tilleul et de l’orme par un sculpteur anonyme de Bologne. En 1370, le peintre Simone dei Crocifissi est chargé de réaliser la polychromie. Sans doute restaurée plusieurs fois, elle est néanmoins parvenue jusqu’à notre époque.

 

En Italie, une dynastie d’artistes, la famille della Robbia ( XVe – début XVIe) utilise la terracotta invertriada ( = terre cuite vernissée) pour réaliser des œuvres de grande qualité dans les églises.

Andrea della Robbia, Crèche, XVe, Volterra. --- Giovanni della Robbia, L'Adoration de l'Enfant Jésus.1521.

 

Attribuée à Ligier Richier, cette statue de  L'Enfant Jésus provient de la collégiale st Maxe, Bar le Duc, aujourd‘hui disparue, et décrite par Dom Calmet, historien de la Lorraine,  en 1751.

Ligier Richier, L'Enfant Jésus, Louvre.

Michel Anguier, Nativité du Val-de-Grâce. 1665, Eglise st Roch, Paris.

Réalisée pour l’église Notre-Dame du Val-de-Grâce, cette oeuvre majeure, emblématique du XVIIe siècle fut transférée à l’église st Roch à Paris. Perfection des postures, des proportions, des tissus et des expressions.

 

Passionnante, comme toujours,  Catherine nous a fait découvrir de nombreuses œuvres originales et rares.

 

 

Prochaine rencontre avec Les Arts 57 :

Vendredi 24 janvier à 15 h (rendez-vous à 14 h 30 sur place)

au Musée de la Cour d'Or à Metz.

Visite guidée et commentée du

PLAN RELIEF et ANTIQUITES GALLO-ROMAINES

Réservation obligatoire par mail ou par tél.

lesarts57@gmail.com   ou tél.   03 87 32 05 03 

(groupe complet)

 

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5 décembre 2024 4 05 /12 /décembre /2024 17:36

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Henri Matisse.

Présentée par Monsieur Kelem COLL, cette conférence, organisée par lesarts57, a réuni 42 personnes qui ont bravé le vent et la pluie, ce mardi 19 novembre, pour venir découvrir Henri Matisse. Chargé d'ingénierie culturelle, de développement et de médiation au Centre Pompidou-Metz, Kelem Coll nous présente ce peintre, célèbre pour ses papiers colorés découpés : « Matisse. D'une méconnaissance de l'art à sa maîtrise totale."

 

 

L'enfance d'Henri Matisse.

Né le 31 décembre 1869 au Cateau Cambrésis dans le nord de la France, il passe toute son enfance à Bohain-en-Vermandois (près de Saint Quentin) où ses parents ont déménagé.

Jamais en contact avec l'art, avec un père dont la profession est marchand de graines, il est cependant issu d'une famille de tisserands et grandit, entouré de tissus de couleurs, ce qui développe très certainement, chez lui, ce lien à la couleur qui influencera son travail. Il suit un parcours scolaire classique puis, part à Paris pour faire des études de droit pendant deux ans et devenir clerc de notaire. 

 

Découverte de l'art. 

G. Moreau, Orphée,1865.

 

Matisse le reconnait lui-même : il ne s'est rendu dans aucun musée au cours de ses études à Paris. Mais une appendicite, qui va le clouer au lit pendant un mois, va tout changer.  Il va découvrir la peinture grâce à son voisin, un peintre amateur. C’est un coup de foudre pour lui, il se rend à nouveau à Paris, mais, cette fois, pour apprendre la pratique de la peinture et de l'art. Il tente d'entrer aux beaux-arts mais rate le concours, il s'inscrit donc à de nombreux ateliers et notamment celui de Gustave Moreau. Ce dernier, acceptera de l'accompagner dans son apprentissage de la peinture et lui dira notamment "Vous êtes né pour simplifier la peinture".

Sa peinture se construit autour de la couleur, qu'il dit ressentir : c'est donc la couleur qui doit organiser la toile. Il travaille par opposition : lorsqu'il appose une dominante, il n'arrive pas à s'empêcher d'y répondre avec un contraste tout aussi puissant. Pour lui les toiles ne doivent pas forcément retranscrire la vérité, elles peuvent la réinventer. Cette amour de la couleur « vive » feront d'ailleurs de lui l'un des inventeurs du fauvisme !

 

Carrière en dates : 

Nature morte avec des livres.

 

 

Juin 1890 : Première peinture appelée "Nature morte avec des livres" qui est très loin du style qui l'a fait connaître mais qui, pour autant, illustre quand même déjà une facilité technique assez déconcertante. 

En octobre 1905 : Il expose aux cotés de Derain et Marquet et, comme eux, se fait qualifier de "Fauve" pour la première fois. Le début du fauvisme représente beaucoup dans la vie de Matisse qui se retrouve au cœur de la création d'un mouvement artistique et d'une pratique. C'est aussi le début de la rentabilité de son travail, à partir de cette période-là, Matisse va pouvoir vivre de son art. 

1906 : Il rencontre Picasso, rencontre importante dans son histoire personnelle. 

1910 : Matisse peint La Danse pour le collectionneur russe Sergeï Chtchoukine. Une vente qui lui permet d'acheter sa première maison à Issy les Moulineaux, en banlieue parisienne, où il s'installe avec sa famille. Ce tableau n'était d'ailleurs pas celui que Matisse avait proposé au départ puisqu'il désirait vendre L'Atelier rouge. 

 

L’Atelier rouge. --- La Danse.

 

1919 : premier papier découpé pour un visuel du ballet Russe (plus de 20 ans avant de s'y intéresser vraiment comme un pratique artistique à part entière.) 

1924 : Matisse sculpte et crée "Grand nu assis" où l'on retrouve une figure très présente dans son travail qu'est l'odalisque. ​​​​​​​

Grand nu assis. --- Jazz.

 

1943/1947 : Elaboration de "Jazz" qui est sa première véritable œuvre en papier découpé. C’est un livre où les papiers gouachés sont découpés à vif à la manière d’un sculpteur. Pour raison de santé il doit rester assis, les papiers découpés ont l'avantage de lui permettre de créer en restant assis. 

 

Matisse et Picasso : 

Il est difficile de parler de Henri Matisse sans parler de Pablo Picasso. L'artiste espagnol a un talent indéniable certes, mais ses défauts le sont tout autant. Matisse a pour réputation, lui, d'être, au contraire, une personne remplie de qualités humaines. Les deux artistes n'ont, en fait, pas grand-chose en commun : Picasso ayant toujours baigné dans l'art, et réputé comme un surdoué qui s'oppose à celui qui a découvert l'art sur le tard, et qui, d'après Gustave Moreau, simplifie la peinture.

Cette différence entre eux et l'impact, qu'ils ont dans le monde de l'art, amène les historiens de l'art mais également les médias à l'époque, à les comparer et à lier leurs destins. Mais il est, malgré tout, important de préciser que cette rivalité est plus fantasmée que réelle, les artistes se connaissaient, se respectaient, et s'inspiraient l'un, l'autre. Le fait de vivre à la même époque et d'être comparés les a, aussi, beaucoup tirés vers le haut et amenés à se réinventer. Ils appartiennent tous deux à un mouvement artistique dont ils sont le porte étendard : le cubisme pour Picasso, le fauvisme pour Matisse. Le respect entre les deux était mutuel, Picasso disait d'ailleurs "Il n'y a que Dieu et Matisse qui ont le droit de critiquer mon travail." 

 

L'héritage de Matisse : 

Henri Matisse décède le 3 novembre 1954, à Nice. De nombreux artistes se sont nourris de son travail et de ses inventions artistiques. On peut tisser des liens entre son travail et les couleurs d'un mouvement artistique comme le pop art ou le travail d'un artiste comme Tom Wesselmann qui a produit des œuvres appelées "After Matisse" qui lui rendent hommage.

 

 

Un marqueur fort, permettant de mesurer l'impact de l'artiste, est le fait d'avoir un musée à son nom.  Matisse a un musée à Nice, la ville où il a terminé sa vie, et un autre au Cateau Cambrésis là où elle avait démarré.

 

 

Le travail de Matisse est rempli d'innovations techniques et artistiques qui, aujourd'hui encore, inspirent et sont reconnaissables au premier regard. L’artiste possède une identité qui lui est propre.

Pour conclure, j’aimerais vous dire, qu’en travaillant sur cette conférence, j’ai réappris à aimer Matisse une énième fois et, comme à chaque fois, d’une manière différente, et je vous invite à vous rendre dans les musées qui exposent ses œuvres, consulter son travail en bibliothèque, ou les vidéos et documents sur internet, cela en vaut vraiment la peine !  Kelem Coll.

Un grand merci à Kelem Coll, dynamique et captivant, pour cette redécouverte qui donne envie d’approfondir le sujet.

 

 

Prochaine rencontre avec Les Arts 57 :

 Samedi 14 décembre à 14h 30, au musée de la Cour d’or à Metz.

La crèche de Noël : histoire, représentations artistiques, symboles.

Conférence présentée par Catherine Bourdieu.

 Réservation obligatoire par mail ou par tél :

 lesarts57@gmail.fr   ou tél.   03 87 32 05 03 

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5 novembre 2024 2 05 /11 /novembre /2024 14:58

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There is always hope, 2002, Londres.

Jeudi 17 octobre 2024, 20h, belle affluence au temple de Longeville pour la conférence « BANSKY, artiste d’art urbain ». Organisée par Les Arts 57 en partenariat avec Les Amis du temple de Longeville-lès-Metz, la soirée est présentée par Catherine BOURDIEU, maîtresse de conférences en Histoire de l'Art à l'Université de Lorraine devant 71 personnes.

Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.

L’histoire du Street Art ou art urbain, est celle d’un art éphémère créé dans l’espace public de manière clandestine et illégale. A la fin des années 1960, aux Etats-Unis comme en Europe, tags et graffitis commencent à se développer. Réalisés avec des bombes de peinture, destinées à repeindre les voitures, ils s’expriment sur des propriétés privées, dans les gares, sur les trains, métros, autobus et s’apparentent à du vandalisme.

A Philadelphie, Darryl McCray  ou «Cornbread »,  est considéré comme le premier graffeur moderne. Il est connu pour déclarer son amour à une jeune fille « Cornbread loves Cynthia » sur tous les supports qu’elle pouvait voir sur son chemin : immeubles, autobus, trains et voitures de police !

En France, l’installation de la base nucléaire sur le plateau d’Albion, déclenche chez Ernest Pignon-Ernest, la création de pochoirs à partir d’une photo d’Hiroshima qui montre l’image de la silhouette d’un passant et d’une échelle imprimés sur un mur par l’éclair atomique. Tandis qu’à Paris, Zloty, cadre aux Galeries Lafayette, peint sur les chantiers de démolition des Halles de Baltard.

Dans les années 1970-80, Jean -Michel Basquiat au graphisme reconnaissable, et Keith Haring s’expriment à New York. Finalement ces artistes qui ont commencé dans la clandestinité et hors des institutions, finissent par être exposés dans les galeries, leurs œuvres sont achetées par les musées !

 

Quant à Banksy, sa véritable identité n’est pas connue, très bien protégée par son entourage. On sait qu’il est britannique, originaire de Bristol. Il œuvre depuis les années 1990 et s’exprime au pochoir. Artiste engagé, il créé des scènes en lien avec l’actualité qui le touche et informe ses abonnés sur sa page Instagram.

A Bristol, une des plus anciennes peintures murales : Take the money and run, où trois voleurs fuient après un vol, porte sa signature mais a été vandalisée depuis.

 

1 L’engagement politique.

The Midl Mild West,1999, Bristol. – Rage, The flower Thrower, 2003, Jerusalem. – La jeune fille triste, Porte du Bataclan, 2018.

A Bristol, en 1999, un ours en peluche s’apprête à lancer un cocktail Molotov sur trois policiers. Dans ces années-là, Banksy commence à travailler au pochoir. Il est recherché par la police. La mairie demande de nettoyer les murs dès ses interventions mais peu à peu les habitants s’y opposent. A Jérusalem en 2003, sur un mur de séparation entre Israël et la Palestine, il réalise un personnage à taille réelle qui lance un bouquet de fleurs. L’homme en noir et blanc porte casquette et foulard sur la bouche, le bouquet est coloré. En 2018, sur la porte du Bataclan, il rend hommage aux victimes des attentats du 13 novembre sous la forme d’une jeune fille qui pleure. Volée, la porte est retrouvée en Italie en 2020, les voleurs emprisonnés.

Banksy a désacralisé l’art par l’emploi du graffiti, technique pas considérée comme artistique, par l’utilisation sans autorisation sur des murs, par la création de dessins subversifs sur différents supports…

Gymnaste, Borodianka. -- Gymnaste à la minerve, Irpin. – Judo, Borodianka. – Homme dans son bain, Horenka. – Enfants sur une balançoire, Kiev. — Femme au masque à gaz.Gymnaste, Borodianka. -- Gymnaste à la minerve, Irpin. – Judo, Borodianka. – Homme dans son bain, Horenka. – Enfants sur une balançoire, Kiev. — Femme au masque à gaz.
Gymnaste, Borodianka. -- Gymnaste à la minerve, Irpin. – Judo, Borodianka. – Homme dans son bain, Horenka. – Enfants sur une balançoire, Kiev. — Femme au masque à gaz.Gymnaste, Borodianka. -- Gymnaste à la minerve, Irpin. – Judo, Borodianka. – Homme dans son bain, Horenka. – Enfants sur une balançoire, Kiev. — Femme au masque à gaz.
Gymnaste, Borodianka. -- Gymnaste à la minerve, Irpin. – Judo, Borodianka. – Homme dans son bain, Horenka. – Enfants sur une balançoire, Kiev. — Femme au masque à gaz.Gymnaste, Borodianka. -- Gymnaste à la minerve, Irpin. – Judo, Borodianka. – Homme dans son bain, Horenka. – Enfants sur une balançoire, Kiev. — Femme au masque à gaz.

Gymnaste, Borodianka. -- Gymnaste à la minerve, Irpin. – Judo, Borodianka. – Homme dans son bain, Horenka. – Enfants sur une balançoire, Kiev. — Femme au masque à gaz.

En Ukraine, il réalise des œuvres au pochoir autour de Kiev. Une gymnaste prend appui et tient en équilibre sur des gravats ou sur le trou dans un mur d’abri, elle porte une minerve et agite son ruban lumineux bien haut. A Kiev, un jeune judoka met à terre un homme imposant, serait-ce une allusion à l’amour du judo de Poutine ? Maison détruite, il n’y a plus d’intimité pour cet homme dans son bain à Horenka. Banksy utilise et détourne des objets rencontrés : ces enfants représentés jouant à la balançoire sur des pièges anti-char, la vieille dame en peignoir et bigoudis sur une chaise. Elle porte un masque à gaz et un extincteur rouge et semble à la fois vulnérable et forte !  La couleur rouge commence à apparaitre plus régulièrement dans ses dessins.

 

 

En décembre 2023, il publie une photographie de sa nouvelle création : trois drones sur un panneau stop à Peckam au sud de Londres. Une heure plus tard, des voleurs sont filmés en train de dérober le panneau.

2. Rats.

Grande source d’inspiration pour par Banksy, le rat est une allégorie de l’être humain utilisée pour révéler des défauts de la société. Il est aussi inspiré par Blek le Rat, pseudo de Xavier Prou, graffeur français, pionnier du street-art dans les années 1980. Le symbole du rat est aussi associé à Banksy lui-même, comme les graffeurs, ils apparaissent la nuit et sont pourchassés.

Banksy, Rat Gangster. –  Xavier Prou, Blek le Rat.

Le rat graffeur tient un pot de peinture et un rouleau coloré en rouge. Au-dessus l’inscription « parce que je suis sans valeur » questionne. Le rat peut prend des attitudes humanisées, anarchique à lunettes dorées, rat manifestant, rat accusateur dénonçant le mensonge en fixant le spectateur droit dans les yeux « you lie » (tu mens), rat et déchets chimiques, le contenu d’un baryl déversé sur le trottoir. Rat au cutter masqué peint à Paris en 2018, sur un panneau à proximité du Centre Pompidou, et volé en 2019.

Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.

En 2004, le rat tient un radar sonique, un magnétophone et porte des écouteurs. Sonic Rat est représenté plusieurs fois dans les rues de Londres, il dénonce les écoutes contre la population londonienne. Bansky réalise aussi des exemplaires en sérigraphies vendues, numérotées et signées. Les ondes sont visualisées en cercles rouges.

Love rat, Liverpool, 2004, peinture murale d’un grand cœur. La peinture coule, il le reproduit en sérigraphie, un pinceau a remplacé le rouleau.

 

Slingshot rat ou Rat au lance-pierre réalisé sur un mur en béton à Bethléem au milieu des années 2000. Le mur découpé et volé reparait à la Urban Gallery de Tel Aviv en 2022.  De nombreuses questions se posent sur le lieu où il a été entreposé, à propos de transaction entre voleurs et galeriste, sur le passage de la frontière…

3 Singes.

Laugh Now est apparu pour la première fois en 2002. Une fresque murale de 6 mètres de long représentant le singe répété 10 fois a été commandé par une discothèque de Brighton. Dix chimpanzés se tiennent côte à côte, de face, présentés comme des hommes-sandwich affichant leur message menaçant : « Riez maintenant, mais un jour, nous serons aux commandes. » La peinture noire sur le fond blanc donne aux primates, normalement espiègles, un air sinistre.

Un éditeur gagne un procès contre Banksy qui perd la propriété du pochoir en mettant en évidence le fait qu’il peut être pris en photo par tout le monde. Chez Christie’s Londres, une peinture sur carton réalisée par Banksy, Laugh now est mise en vente en 2021.

Laugh now – Singe au détonateur, Londres, 2006.

Kissing Coppers, 2004- Brighton.

4. Policiers.

Sur le mur du pub du Prince Albert à Brighton, 2 policiers s’embrassent sur la bouche : militantisme en faveur de l’acceptation de l’homosexualité par la société ? remise en question de l’autorité ? … Le pochoir est vandalisé, le pub le fait transférer sur toile et le remplace par une copie, l’original est vendu dans une vente aux enchères à Miami !

 

5. l’art.

La Joconde, sourire toujours énigmatique, porte un blouson, des écouteurs et tient un Bazooka. La jeune fille à la perle de Vermeer est représentée sur le mur du Dockside Studio à Bristol. La perle est remplacée par un boitier mural, de jeune fille à l’oreille percée, elle devient la jeune fille au tympan percé. Sur un autre dessin Banksy assimile ses propres pochoirs, que l’on effaçait régulièrement, à la valeur qu’ont pour nous les peintures rupestres et que nous serions horrifiés de voir détruites au karcher pour nettoyer une grotte !

Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.

6. Les enfants.

Les enfants sont aussi un support d’engagement pour Banksy. Dans Pas de jeux de ballon, des enfants jouent à la balle avec une inscription interdisant de le faire, idée que même les enfants doivent transgresser les règles de la société. En 2013, l’ensemble, retiré du mur, a été divisé en trois parties et vendu au profit des enfants défavorisés. L’année du jubilé de la Reine (2012), un pochoir montre un enfant en train de fabriquer des drapeaux britanniques, Slave labor dénonce le travail des enfants dans l’industrie textile. Ce pochoir a été arraché du mur par le propriétaire qui l’a vendu aux enchères pour 1 million de dollars !

No ball games, 2009, Londres. — No Future, 2010, Southampton. – Slave Labor, 2012.

 

Petite fille jouant avec un pneu enflammé : ce dessin orne un mur de la cour d’une école de Bristol pour remercier les élèves qui avaient donné le nom de Banksy à un bâtiment. Le dessin, réalisé pendant les vacances d’une manière enfantine aurait été effacé par le gardien si Banksy n’avait pas laissé une lettre l’authentifiant et permettant aux enfants d’ « y ajouter des trucs ».

Season’s greetings, (Meilleurs vœux), 2019, Port Talbot, pays de Galles.

Ce petit garçon semble jouer avec des flocons de neige et tirer la langue pour les avaler. En réalité c’est une poubelle en feu qui projette des cendres. Cette œuvre est une charge contre la ville la plus polluée du pays de Galles. Le propriétaire, un marchand d’art, louait le pochoir à la ville. Il attirait des touristes. Mais la location est jugée chère par la municipalité, le dessin est démonté en 2022 et remonté à l’université d’Irpswich à 100km de Londres.

 

Un petit garçon joue avec une poupée représentant une infirmière, il a jeté Batman et Superman à la poubelle. Réalisé en 2020 sur le mur de l’hôpital de Southampton, le pochoir est un hommage aux soignants lors de la pandémie de covid. En mars 2021, Banksy vend le tableau aux enchères pour 19 millions d’euros pour soutenir les soignants.

 Game changer, 2021.

When live gives you lemons …, 2024

Sur un mur de Nottingham, une fillette joue au hula-hoop, avec un pneu de vélo devant une vieille bicyclette attachée à un poteau et dont la roue arrière manque justement ! Inspiré du message anglais « When live gives you lemons, make limonade » = « Quand la vie te donne des citrons, fais-en de la limonade », ou transformer les inconvénients de la vie en quelque chose de meilleur : ici à défaut de pouvoir rouler sur ce vélo, la fillette s’amuse en s’adaptant ! Message d’espoir optimiste en cette période troublée, l’œuvre attire de nombreux curieux et fans de l’artiste, elle donne une certaine notoriété à la devanture du petit salon de coiffure.

Parfois, Banksy détourne de vrais objets pour installer ses pochoirs : pour faire le rat qui effraie la petite fille, il utilise un petit bout de mur où le crépis est tombé pour faire le corps du rat, ajoute la queue, les oreilles et moustaches. La rampe d’escalier pour la fillette aux bulles de savon, le tag effacé pour la vieille dame aux écouteurs, perplexe, elle observe le socle où il n’y a rien…, irrévérencieux pour celle qui éternue !

Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Au lendemain de la conférence « Banksy, artiste d’art urbain » à Longeville-les-Metz, le 17 octobre 2024.
Well Hung Lover, 2006, Bristol.

7. Scènes diverses.

 

Par une fenêtre ouverte, un homme cherche quelque chose, près de lui une femme en sous-vêtements et un homme nu suspendu sous la fenêtre. Œuvre peinte sur le mur d’une clinique soignant les problèmes sexuels. La ville souhaitait nettoyer les nombreux graffitis apposés sur les murs. Après une consultation en ligne, les habitants ont souhaité à 97% que ce graffiti soit préservé. Le conseil municipal de Bristol a alors accordé une autorisation rétroactive, ce qui fait de cette scène la première œuvre légale de street - art en Angleterre !

En 2010, voyage à New York, Banksy revisite quelques grands symboles de l’Amérique : Good Doctor, Lincoln SDF, la statue de la Liberté enfant…  Première distorsion : imaginer une statue comme un être humain qui a été enfant. Deuxième provocation :  en esquissant un geste impoli, il suggère qu’avant d’être cette allégorie de l’Amérique, elle a traversé une période moins empreinte de noblesse.

I love New York, 2010, Cedar Street, New York -- Lincoln SDF -- La statue de la Liberté enfant.

Sur le mur d’une maison de jeunes à Bristol, un couple s’enlace mais au lieu de se regarder, ils regardent leur portable par-dessus l’épaule de l’autre. C’est une critique de la société contemporaine où le téléphone portable isole les individus.

Mobile lovers, 2014, Bristol.

L’homme préhistorique et le plateau de McDonald – Les rayures du zèbre – L’homme fuyant Cupidon.

L’homme préhistorique et le plateau de McDonald – Les rayures du zèbre – L’homme fuyant Cupidon.

8. Des performances ou d’autres actions illustrent aussi les démarches subversives de Banksy.

En 2004, il crée cent mille faux billets de 10 livres. Il remplace le portrait de la reine par celui de Lady Diana, remplace l’inscription « Bank of England » par «Banksy of England » et au verso place un portrait de Darwin avec l’inscription « Trust no one », « Ne faites confiance à personne », il les distribue pendant le carnaval à Nothing Hill, au Reading festival. Une valise pleine est déposée et dans une station du métro de Londres. En 2019, un exemplaire est acquis par le British Muséum !

 

En 2004-2005, il installe des œuvres qu’il a créées dans des grands musées :

- Boite de soupe tesco et Portrait de Kate Moss rappelant les boites de Campbell’s et portrait de Marilyn au MoMa, N Y.

- Chasseur préhistorique poussant un chariot de super marché et son cartel citant l’artiste Banksymus Maximus, au British muséum qui décide de le conserver.

- Insecte porteur de missile au musée d’histoire naturelle.

- Joconde smiley au Louvre.

En 2005, exposition à Londres Crude Oils ou Huiles brutes. Il détourne et modifie des tableaux achetés aux puces.

Show me the Monet – Les tournesols – Vierge à l’Enfant à l’Ipod.— Les Glaneuses.
Show me the Monet – Les tournesols – Vierge à l’Enfant à l’Ipod.— Les Glaneuses.
Show me the Monet – Les tournesols – Vierge à l’Enfant à l’Ipod.— Les Glaneuses.
Show me the Monet – Les tournesols – Vierge à l’Enfant à l’Ipod.— Les Glaneuses.

Show me the Monet – Les tournesols – Vierge à l’Enfant à l’Ipod.— Les Glaneuses.

En 2015, il crée un parc d’attraction, près de Bristol, nommé Dismaland, parodie de Disneyland (Dismal = lugubre) : accueil désagréable, château lugubre, pêche aux canards autour d’un pélican englué de mazout… ce parc, était en réalité une exposition d’artistes avec des concerts organisés pendant l’été.

La petite fille au ballon, réalisé à Londres sur le pont de Waterloo en 2002. Une petite fille lasse s’envoler un ballon en forme de cœur. Derrière elle une inscription « There is always hope », « Il y a toujours de l’espoir ». En 2014, Tony Baxter, directeur d’une entreprise d’événementiel fait prélever le pochoir au motif que sans lui l’œuvre était en voie d’effacement et n’aurait pas subsisté longtemps.

There is always hope, 2002, Londres. -- Love is in the bin, 2018.

 

Le 5 octobre 2018, une reproduction du pochoir est vendue pour plus d’un million de livres. C’est un tableau à l’acrylique que Banksy avait donné. Juste après son adjudication, un mécanisme interne se déclenche et déchiquète l’image jusqu’à la moitié. Le collectionneur conserve l’œuvre. Le 12 octobre suivant, Sotheby’s présente l’œuvre avec un nouveau titre « Love is in the bin » « L’amour est à la poubelle », elle prend une valeur nouvelle car elle est à la fois une pièce unique et la première œuvre créée pendant une vente aux enchères !

9. Série sur les vacances en août 2021.

Il réalise 9 pochoirs dans le sud-est de l’Angleterre.

Rat sur la plage, Lowestoft -- La mouette – Les bernard - l’ermite, Cromer –We are all in the same boat, Outlon Broad – Les danseurs, Great Yarmouth.
Rat sur la plage, Lowestoft -- La mouette – Les bernard - l’ermite, Cromer –We are all in the same boat, Outlon Broad – Les danseurs, Great Yarmouth.
Rat sur la plage, Lowestoft -- La mouette – Les bernard - l’ermite, Cromer –We are all in the same boat, Outlon Broad – Les danseurs, Great Yarmouth.
Rat sur la plage, Lowestoft -- La mouette – Les bernard - l’ermite, Cromer –We are all in the same boat, Outlon Broad – Les danseurs, Great Yarmouth.
Rat sur la plage, Lowestoft -- La mouette – Les bernard - l’ermite, Cromer –We are all in the same boat, Outlon Broad – Les danseurs, Great Yarmouth.

Rat sur la plage, Lowestoft -- La mouette – Les bernard - l’ermite, Cromer –We are all in the same boat, Outlon Broad – Les danseurs, Great Yarmouth.

10. Nouvelle série en août 2024 à Londres.

Conçus pour apporter un peu de légèreté aux londoniens, pendant l’été, il leur offre un nouveau pochoir dans la ville, chaque jour de la semaine.

Lundi 5 août : Bouquetin, Richmond (ouest de Londres) ; mardi : Eléphants, Chelsea ; mercredi : Singes à Shoreditch (est de Londres) ; jeudi : Loup hurlant sur une parabole à Peckam (sud) volé par 3 hommes masqués. Piranhas transformant une guérite de police en aquarium. Rhinocéros escaladant une voiture abandonnée. Pélicans au-dessus d’une vitrine de Fish and chips. Gorille libérant les animaux du zoo le 13 août.

Avec le temps, les pochoirs de Banksy sont devenus mythiques. L’identité préservée de l’artiste, des apparitions qui le montrent sans qu’on puisse l’identifier (capuche, masque, gants), l’attribution du statut d’artiste, les vols réguliers de ses pochoirs dont la valeur ne cesse d’augmenter, ses interventions en réaction à certaines pratiques et la création de deux musées, à New York et à Paris (44 rue du faubourg Montmartre, 9e), sont des paradoxes pour cet artiste qui a une volonté de transgression et une ironie certaine envers les institutions.

 

Il semble que ses pochoirs font l’objet d’imitations ou d’hommages. Deux sont apparus à Bordeaux mais pas identifiés sur son compte Instagram ce qui plaide en faveur d’une imitation et témoigne de son influence parmi les artistes.

L'artiste est inventif et prolifique, mais en restant anonyme, il ne peut être reconnu comme auteur de ses œuvres.

Très belle et surprenante découverte  grâce à Catherine, vraiment passionnante comme toujours.

Prochaine rencontre avec Les Arts 57 :

Conférence le mardi 19 novembre à 20 H à Saulny.

Salle Muller (dans la salle polyvalente) de Saulny

Soirée présentée par M. Kelem COLL

" Matisse. D’une méconnaissance de l’art à sa maîtrise totale."

 Réservation obligatoire par mail ou par tél :

 lesarts57@gmail.com  ou tél.   03 87 32 05 03 

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Published by lesarts57
23 octobre 2024 3 23 /10 /octobre /2024 14:15

Le 21 Mai 2024, notre association LesArts57 a organisé pour deux groupes de 14 personnes une visite des ateliers Jean Salmon à Lorry les Metz. Cet atelier de création, conception, réalisation et restauration de vitrail existe depuis plus de 50 ans. D’un effectif de 5 artisans et administratifs, c’est un des plus importants ateliers lorrains de vitrail. Il s’associe avec des artistes pour la création.

L’atelier situé route de Woippy est récent et moderne. Il date de 10 ans. Dans la pièce d’accueil, des vitrines présentent divers objets en verre très colorés et variés, réalisés selon la technique du fusing (différents verres collés à chaud, 800°) ou du soufflage et, bien sûr, de magnifiques vitraux, dont nous avons pu suivre la création avec les explications de notre guide.

Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.

Le vitrail est une technique bien particulière de travail de pièces de verre plat, reliés par un réseau de plombs. L’artisan suit un carton souvent créé par un artiste, avec qui il collabore pour décider où mettre les plombs. Un artisan verrier peut aussi être concepteur-créateur. La formation de verrier dans la région, le CAP, se fait à Vannes le Chatel. Le Brevet des Métiers d’Art se fait à Paris, ainsi que le Master à l’Ecole Supérieure des Arts Appliqués et Métiers d’Art.

Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.

 

Le concepteur exécute un tracé à l’échelle 1. Un calque reprend le réseau de plomb, et tous les morceaux de verre sont numérotés.

Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.

Le plomb est une baguette en forme de H, souple, qui comprend une « âme » et des ailes pouvant mesurer de 3 à 25 mm. Ce matériau a une longue durée de vie et résiste à l’oxydation en profondeur.  Les consignes de sécurité sont très strictes, (aspiration continue, gants, tabliers).

La plaque de verre est créée à partir d’un verre teinté dans la masse par des oxydes métalliques et soufflé à la bouche. Le verrier forme un grand cylindre qu’il vient couper et aplatir. Il peut ajouter du bicarbonate qui va provoquer l’apparition de bulles. La verrerie de Saint Just / Loire est le seul fabricant français. Sinon, il provient d’Allemagne, des USA. On peut fabriquer un verre dichroïque, comme celui utilisé pour les nouveaux vitraux de la cathédrale de Metz de l’artiste Kimsooja. C’est une technique de fabrication complexe qui permet d’obtenir plusieurs couleurs selon l’éclairage.

Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.
Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.

 

Enfin, le verrier utilise une molette diamant au carbure de tungstène pour suivre le gabarit et découper ses pièces.

 

On peut peindre le verre, et tout ce qui est peint est cuit à 650°. Par exemple, pour faire une grisaille on utilise une mixture d’eau, vinaigre, blanc d’œuf, miel. En l’appliquant en différentes couches, on joue sur la transparence.

Quelques temps après la visite de l’atelier Jean Salmon à Woippy, le 21 mai 2024.

Il faut donc déplomber un vitrail lorsqu’on doit le restaurer, pour le recuire.

Pour le verre émaillé, on utilise de la poudre qui devient transparente et colorée une fois cuite. On peut aussi peindre à l’arrière d’un vitrail.

 

Pour les plombs, on rabat les ailes du H. Avec un fer électrique, on pose des points d’étain en faisant une soudure à chaque intersection.

Les panneaux peuvent être mastiqués (mastic liquide fait maison à l’huile de lin), ce qui les rend étanches. Ils sont maintenus par des vergettes fixées à l ‘arrière et scellées dans le mur.

 

L’atelier se charge de la conception de nouveaux vitraux selon chaque nouveau projet de particuliers ou de collectivités, ou effectue également de minutieuses restaurations.

Et, si cette visite vous a intéressé-e, vous pouvez participer à un stage dont vous repartirez votre création personnelle sous le bras.  Arielle S.

 

Prochaine rencontre avec Les Arts 57 :

Conférence le mardi 19 novembre à 20 H à Saulny.

Salle Muller (dans la salle polyvalente) de Saulny.

Soirée présentée par M. Kelem COLL

" Matisse. D’une méconnaissance de l’art à sa maîtrise totale."

 Réservation obligatoire par mail ou par tél :

 lesarts57@gmail.fr   ou tél.   03 87 32 05 03 

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2 octobre 2024 3 02 /10 /octobre /2024 08:31

 

Harold Edgerton, Milk Drop Coronet, 1957.

Pour cette rentrée, jeudi 5 septembre, la rencontre organisée par LesArts57 est au centre Pompidou-Metz. A 15h, Romain emmène le groupe de 24 personnes, découvrir l’exposition « Voir le temps en couleurs, les défis de la photographie. »

Aujourd’hui, des milliers d’images circulent, l’exposition va permettre de revenir aux fondamentaux. Le but pour Sam Stourdzé, commissaire de l’exposition, grand spécialiste de photographie et directeur de la Villa Médicis à Rome, est de « voir comment les avancées techniques ont permis aux photographes de conquérir l'esthétique ». L’exposition est construite en trois parties : Voir puis le temps et enfin la couleur.

 

La première photographie connue est Point de vue du Gras de Nicéphore Niepce. Prise depuis la fenêtre de sa maison, elle est datée de 1826. Réalisée à l’aide d’une chambre noire et d’une plaque d’étain de 16 x20 cm recouverte de bitume de Judée. Temps de pose d’au moins une journée.

 

Etymologiquement photographie signifie écriture de la lumière. La camera obscura (ou chambre noire), dont les origines sont difficiles à dater (Antiquité, Léonard de Vinci… ?), permet au moyen d’un petit trou percé dans une paroi de la chambre noire, de projeter l’image de la réalité renversée et inversée.

 

Dés l’entrée de la galerie 2, la photographie de cette ville à l’envers surprend. L’artiste cubain contemporain Abelardo Morell se réapproprie le principe de la camera obscura en transformant des pièces en chambres noires. Il capture l’image de l’intérieur et en réalise des photographies grand format.

La visite se poursuit dans une petite salle obscure qui permet de découvrir l’installation de Hans Peter Feldmann. Elle projette les ombres des objets sur le mur, rappelant le mythe de la caverne de Platon, où les images se substituent à la réalité. Collectionneur de bibelots, il les met en scène : des mécanismes font tourner les petits plateaux circulaires. Les ombres apparaissent multiples et dansantes sur un écran.

VOIR.

Révéler un sujet pour le fixer en une image sur papier est l’un des premiers enjeux de la photographie. Elle permet ainsi de faire circuler les images, de montrer des œuvres d’art, des paysages auxquels on n’a pas accès.  Elle est très vite reconnue comme un outil de préservation des biens culturels.

Près d’une copie officielle de La Joconde réalisée par un peintre italien au XVII e, et prêtée par Le Louvre, figure une photographie de Gustave Le Gray, 1854-55. Peintre de formation, il manipule les agents chimiques pour varier les tonalités dans ses tirages. Il revendique une pensée esthétique de la photographie.

Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.

Images documentaires aussi, les clichés des œuvres de Botticelli (fin XIXe) pris à la Galerie des offices à Florence, certains sur des tirages au charbon plus sombres, contrastés et résistants, d’autres sur  sur papier albuminé  offrant une meilleure brillance.

Autre rôle important de la photographie au service de la restauration des œuvres, elle permet de localiser les zones à réparer par exemple dans La Cène retrouvée très abimée.

Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.

 

Avec l’œuvre Repeint, une photographie agrandie à près d’un million de fois d’un échantillon de peinture prélevé sur un tableau de la Renaissance italienne du Louvre, Dove Allouche réalise une autre œuvre d’art étonnante, esthétique, témoin du temps qui passe.

Dove Allouche, Repeint_29, 2019-21. Matrice organique, carbonate de calcium, fer, grains de terre, feuille d’or, blanc de plomb, vermillon.

Constantin Brancusi, mécontent des prises de vues de ses sculptures à l’exposition de New York en 1914, décide qu’il les photographiera lui-même. Conseillé par Man Ray, il met en scène ses sculptures dans son atelier, ne laissant au hasard aucun détail : position du socle, jeux de lumières, fond de couleur… pour obtenir les meilleures images de ses sculptures, archives précieuses maintenant.

 

 

La photographie permet aussi de voir ce que l’on ne peut pas saisir à l’œil nu. Ce cliché pris grâce aux rayons X, découverts par Röntgen en 1895, montre le squelette du pied dans une chaussure.

Albert Londe, Radiographie positive d’un pied chaussé, 1898.

Viennent ensuite les conquêtes de l'infiniment petit et de l'infiniment grand. Impossible à voir à l’œil nu, le joli ordonnancement de cellules végétales de Laure Albin Guillot dans les années 1930, ou le camaïeu coloré d’une lame mince de gypse photographiée en 2019. Prises au microscope, ces photographies mélangent science et art.

Laure Albin Guillot, Planche tirée de l’album Micrographie décorative, 1931. – Dove Allouche, Tirage d’après une lame mince prélevée sur un bloc de gypse, 2019.

 

L’infiniment grand des montagnes ou des astres nous offre aussi des clichés incroyables. La netteté des photographies des frères Bisson dans les années 1850-60 dans le massif du Mont Blanc est remarquable. Utilisant la technique du collodion humide, procédé qui nécessite un vrai laboratoire ambulant pour développement immédiat sur place et le transport de 250 kg de matériel, ils prennent près d’une centaine de vues étonnantes. La disposition des explorateurs encordés, tout petits, donnent une idée de la difficulté du terrain et de l’échelle du glacier.

Frères Bisson, Ascension du Mont Blanc, 1860. – Savoie, La Crevasse, 1862. Epreuves sur papier albuminé d’après un négatif sur verre au collodion humide.

L’observatoire de Paris a prêté les tout premiers clichés de la Lune pris au télescope par les frères Henry dans les années 1890. La sensibilité des plaques leur permet d’obtenir un degré de précision qui dévoile la surface de la lune de façon inédite. Et que dire des incroyables photos prises depuis l’espace dans les années 1960 :  des vues de la terre, les premiers pas de l’homme sur la lune ou de la sortie extravéhiculaire non attachée… ces photographies icônes de la conquête spatiale nous montrent un monde auquel nous ne pouvons avoir accès.

Mission Apollo 11- Pied de Buzz Aldrin sur le sol lunaire, 1969. Premier pas sur la Lune, Neil Arm strong --- Première sortie extravéhiculaire non attaché, 1984.
Mission Apollo 11- Pied de Buzz Aldrin sur le sol lunaire, 1969. Premier pas sur la Lune, Neil Arm strong --- Première sortie extravéhiculaire non attaché, 1984.
Mission Apollo 11- Pied de Buzz Aldrin sur le sol lunaire, 1969. Premier pas sur la Lune, Neil Arm strong --- Première sortie extravéhiculaire non attaché, 1984.
Mission Apollo 11- Pied de Buzz Aldrin sur le sol lunaire, 1969. Premier pas sur la Lune, Neil Arm strong --- Première sortie extravéhiculaire non attaché, 1984.
Mission Apollo 11- Pied de Buzz Aldrin sur le sol lunaire, 1969. Premier pas sur la Lune, Neil Arm strong --- Première sortie extravéhiculaire non attaché, 1984.

Mission Apollo 11- Pied de Buzz Aldrin sur le sol lunaire, 1969. Premier pas sur la Lune, Neil Arm strong --- Première sortie extravéhiculaire non attaché, 1984.

 

 

Elles inspirent des artistes. Hugo Deverchère réalise des vues terrestres d’un désert de sable en Asie. En utilisant une technique de captation des astronomes (par caméra infra-rouge) et en développant les images par le procédé cyanotypique, il obtient de magnifiques photographies des dunes qui évoquent celle de la Nasa.

Gustave Le Gray, La Grande Vague à Sète, 1857.

LE TEMPS.

 

Figer le temps, jouer avec le fait de prendre des photos rapidement ou à l’inverse très longuement. En 1857, Gustave Le Gray réalise des vues marines et pour rendre mer et ciel aux intensités lumineuses si différentes sur un même tirage, il assemble deux négatifs, un pour la mer, l’autre pour le ciel. Ce sont les premiers photomontages privilégiant l’aspect esthétique à l’aspect réaliste. (Le ciel ne se reflète pas dans l’eau et il était possible de retrouver le même ciel sur différentes photos !)

 

Prenant le contrepied de l’instantanéité, Le photographe contemporain Hiroshi Sugimoto choisit des temps de pose longs. C’est la trainée blanche de la lune qui dessine l’horizon, l’aspect cotonneux fascine. 

Hiroshi Sugimoto, Mer de Tasmanie, Baie de Marian, 2017.

Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.

Réussir à suspendre le temps, figer l’instant sur un cliché, c’est Eadweard Muybridge et Etienne-Jules Marey qui parviennent à prendre des images successives à quelques fractions de seconde d’intervalles (27 images/seconde pour le vol du goéland). Les clichés ainsi obtenus fixent différentes étapes d’un mouvement, imperceptibles à l’œil humain comme la décomposition du mouvement du saut d’un perchiste, de la course d’un cerf, du vol d’un oiseau. Le musée d’Orsay a prêté d’étonnantes planches de chronophotographies rarement visibles : course d’un porc, ruade d’un âne, saut d’un chat …  Leurs travaux serviront bien des domaines : sciences, médecine, arts … Degas, (entre autres) s’appuie sur ces découvertes pour ses sculptures.

Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.

Plus tard, le scientifique américain Harold Edgerton, inventeur du flash stroboscopique en 1926, produit des images saisissantes. L’appareil stroboscopique envoie la lumière en flashs au millionième de seconde près. Les magnifiques photographies de la goutte de lait qui jaillit, de la balle de pistolet qui traverse une pomme, la balle de tennis dans la raquette…. sont devenues iconiques.

Harold  Eugène Edgerton, Batterman plongeant, 1955 --- Corde à Sauter, 1952.---Jus de canneberge tombant dans le lait, 1960. – Gouttes de lait, 1963. -- La couronne de goutte de lait, 1957. -- Balle traversant une pomme 1964.
Harold  Eugène Edgerton, Batterman plongeant, 1955 --- Corde à Sauter, 1952.---Jus de canneberge tombant dans le lait, 1960. – Gouttes de lait, 1963. -- La couronne de goutte de lait, 1957. -- Balle traversant une pomme 1964.
Harold  Eugène Edgerton, Batterman plongeant, 1955 --- Corde à Sauter, 1952.---Jus de canneberge tombant dans le lait, 1960. – Gouttes de lait, 1963. -- La couronne de goutte de lait, 1957. -- Balle traversant une pomme 1964.
Harold  Eugène Edgerton, Batterman plongeant, 1955 --- Corde à Sauter, 1952.---Jus de canneberge tombant dans le lait, 1960. – Gouttes de lait, 1963. -- La couronne de goutte de lait, 1957. -- Balle traversant une pomme 1964.
Harold  Eugène Edgerton, Batterman plongeant, 1955 --- Corde à Sauter, 1952.---Jus de canneberge tombant dans le lait, 1960. – Gouttes de lait, 1963. -- La couronne de goutte de lait, 1957. -- Balle traversant une pomme 1964.

Harold Eugène Edgerton, Batterman plongeant, 1955 --- Corde à Sauter, 1952.---Jus de canneberge tombant dans le lait, 1960. – Gouttes de lait, 1963. -- La couronne de goutte de lait, 1957. -- Balle traversant une pomme 1964.

Ducos du Hauron, Vue du Jardin d’Agen,1877.

EN   COULEURS.

 

Parmi les multiples essais pour relever le défi de la photographie couleur, c’est à Louis Ducos du Hauron, que l’on doit les premiers essais couleur en 1877. Il superpose trois plaques négatives pigmentées en jaune, rouge et bleu.

 

Un peu plus tard, les frères Lumière, en inventant le procédé des plaques autochromes, industrialise la photographie couleur en 1907. Ce sont des plaques de verre saupoudrées de microscopiques particules de fécule de pomme de terre teintées en trois couleurs.

Un dispositif permet de découvrir « les plaques précieuses d’Auguste Ponsot ». Ce physicien cherchait à améliorer le procédé Lippmann qui utilise l’ensemble des ondes lumineuses du spectre et produit des photo couleurs de grande qualité : les photographies interférentielles. En ouvrant les couvercles on peut observer ces plaques de verre colorées datant des années 1905-06 : inscrites au titre des Monuments historiques.

En 1912, le banquier, mécène et philanthrope Albert Kahn lance le projet des Archives de la planète, inventaire visuel destiné à archiver un monde en transformation. Pendant plus de vingt ans, des opérateurs se rendent dans de nombreux pays. Grace au procédé des plaques autochromes, ils photographient les paysages, les hommes et leurs activités et produisent près de 72 000 photos, précieux témoignage ethnographique.

Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Quelques temps après la visite guidée « Voir le temps en couleurs » au Centre Pompidou-Metz, le 5 septembre 2024.
Diana( Bridgeman), Lady Abdy, 1936.

Alors que la photographie couleur en est encore à ses balbutiements, au début des années 20, en Angleterre Yevonde Middleton expérimente beaucoup en utilisant le nouveau procédé Vivex (superposition de 3 négatifs cyan, magenta et jaune). Les clichés, hauts en couleurs, excentriques, de cette incroyable pionnière, en font une photographe reconnue dans les années 1930. Elle reçoit de nombreuses commandes publicitaires et de portraits. Elle produit une série de portraits de femmes de la haute société en costume mythologique.

Madame Yevonde, Nadine Muriel, comtesse de Shrewsburry en Ariane, 1935 -- John Gielgud en 'Richard of Bordeaux', 1933.— Gertrude Lawrence, 1936.

 

Saul Leiter, Phone call, (appel téléphonique), 1957.

Saul Leiter fut l’un des pionniers de la photographie contemporaine couleur à une époque où seul le noir et blanc était digne d’intérêt. Il capture la vie quotidienne des rues de New York dans un style unique et novateur. Il recherche les instants et les scènes fugaces. Ses images souvent floues dévoilent des cadrages originaux.

 

Sans titre, restaurant San Carlos, 1950. -- Red umbrella, (parapluie rouge), 1957. -- Peintre d’enseigne, 1949.

Toute la fin de l’exposition est dédiée à la couleur. Bien sûr il est impossible de tout montrer, mais dans les années 1970, l’Ecole de New York rassemble des photographe modernes, elle est bien représentée avec Helen Levitt, Stephen Shore, et Joel Meyerowitz. 

Helen Levitt, N.Y., 1971 --- Stephen Shore, 1973 -77. --- Joel Meyerowitz. Truro, 1976 – Florida, 1967.
Helen Levitt, N.Y., 1971 --- Stephen Shore, 1973 -77. --- Joel Meyerowitz. Truro, 1976 – Florida, 1967.
Helen Levitt, N.Y., 1971 --- Stephen Shore, 1973 -77. --- Joel Meyerowitz. Truro, 1976 – Florida, 1967.
Helen Levitt, N.Y., 1971 --- Stephen Shore, 1973 -77. --- Joel Meyerowitz. Truro, 1976 – Florida, 1967.

Helen Levitt, N.Y., 1971 --- Stephen Shore, 1973 -77. --- Joel Meyerowitz. Truro, 1976 – Florida, 1967.

Si l'exposition débute par les reproductions photographiques de peintures, elle se termine à l'inverse par des peintures réalisées sur la base de photographies par Gerhard Richter dès le début des années 1960. Il efface les coups de pinceaux, brouille les limites entre photographie et peinture, la boucle est bouclée !

Un grand merci à Romain pour son enthousiasme, ses explications claires dans le ce domaine qui a fait partie de sa  formation aux beaux-arts, spécialité photo.  Cette belle et riche exposition mérite qu'on prenne le temps de s'y attarder, de regarder les étonnantes vidéos et d'admirer ces oeuvres superbes.

Prochaine rencontre avec Les Arts 57 :

Conférence : jeudi 17 octobre, 20h, au Temple de Longeville

« Banksy, artiste d’art urbain »

Soirée présentée par Catherine Bourdieu.

 Réservation obligatoire par mail ou tel.

lesarts57@gmail.fr   ou tél.   03 87 32 05 03 

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29 août 2024 4 29 /08 /août /2024 09:03

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Edward Hopper,  New York Office, (Bureau à New York), 1962.

 

Cette belle rencontre au Château Fabert de Moulins les Metz, organisée par LesArts57, et présentée par Jean Yves Bègues a réuni environ 80 personnes. Amateur d’art, médecin et élu de la ville, Jean Yves Bègues remercie chaleureusement le public venu en nombre et ses fidèles amis.

Il propose de partager son intérêt pour « Edward Hopper », peintre américain aux toiles souvent énigmatiques. Figure emblématique de l’art américain, son œuvre reflète la nostalgie, la solitude des classes moyennes dans une Amérique triomphante, et puissante économiquement. 

Autoportrait, 1903-06.

 

Edward Hopper nait en 1882 dans la banlieue nord de New York, au bord de l’Hudson dans un cocon familial traditionnel. De souche anglaise et hollandaise, ses parents, établis aux Etats Unis depuis plusieurs générations, tiennent un commerce de mercerie. Dans les années 1900, il se forme au métier d’illustrateur à New York, se perfectionne en graphisme, puis en peinture. Il a pour professeur, entre autres, Robert Henri.

Stairway at 48 rue de Lille, Paris, 1906.

 

Ses études terminées en 1906, il part pour un an à Paris, fréquente les expositions, peint en plein air. Il admire Manet et surtout Degas dont il aime l’audace des points de vue et la modernité des sujets (en particulier Le Bureau de coton pour sa mise en scène). Il s’imprègne de culture française, lit Hugo, Zola, aime la poésie de Verlaine ou Rimbaud... Le réalisme de Courbet lui plait beaucoup. Palette réduite, couleurs chaudes pour cet escalier si réaliste. Le motif de l’escalier signifie aussi pour lui le passage d’un état à un autre de l’intérieur vers l’extérieur, du haut vers le bas, et inversement …

Il se rend à Londres, découvre Turner, à Amsterdam, il est impressionné par la Ronde de nuit de Rembrandt. Pendant ses études, sa palette est sombre, basée sur le bleu-gris ou le brun chaud. A Paris, elle s’éclaircit nettement sous l’influence des impressionnistes. Il effectuera encore deux courts séjours en France en 1909 et 1910.

Notre-Dame de Paris, 1907. --- Pont des Arts, 1907.

Aux Etats Unis, en 1908, Robert Henri prend la tête d’un mouvement contestant l’autorité de la National Academy qui impose des normes et contrôle les expositions et le marché de l’art. Au nom d’une modernité inspirée par les impressionnistes, huit peintres « The Eight », prônent une peinture de la vie quotidienne américaine. A New York, Hopper travaille comme illustrateur dans une agence de publicité. Il considérait cette pratique comme purement alimentaire, et pendant son temps libre, préférait peindre. Nombre de sujets qu’il a conçu dans le cadre de son travail d’illustrateur trouveront un écho dans sa peinture.

Sailing, 1911.

Il vend sa première toile Sailing (Promenade en mer) au grand salon de l’Armory Show en 1913, à New York. Il n’en vendra plus pendant dix ans ! Ses toiles ayant peu de succès, il se tourne alors vers la gravure. Ses eaux fortes sont plus appréciées. Dans une gravure, le contraste lumière-ombre a un rôle capital. Hopper reconnait : « ma peinture sembla se cristalliser quand je me mis à la gravure. » 

 

Evening Wind, (Vent du soir), 1921

Une jeune femme se met au lit, soudain le vent soulève le rideau de la fenêtre ouverte. Surprise, elle arrête son mouvement et tourne la tête. Le visage est caché par la chevelure. Le rideau, gonflé par le vent, placé au centre prend une dimension théâtrale. La surface claire par la fenêtre est en contradiction avec le titre qui évoque l’obscurité. L’impression de lumière éclatante dans l’espace extérieur surprend et interroge.

Night on the El Train, 1918 -- The Catboat, 1922. – The Locomotive, 1922.
Couvertures illustrées de la revue The Morse Dry Dock Dial, 1921.

En 1924, il épouse Joséphine Nivison, peintre elle aussi. Il se remet à l’aquarelle, peint des paysages ruraux et urbains. Il aime l’architecture, les bateaux. Il voyage beaucoup en train, représente des vues dans et depuis le train. Après le succès de ses gravures, Hopper a acquis une Dodge en 1927. Avec Jo, ils sillonnent les routes aux Etats Unis et réalisent de nombreux croquis depuis la voiture.  Les Hopper vivent la moitié de l’année à New-York, le reste du temps, au sud de Boston, à South Truro dans le Massachusetts, près de la baie de Cap Cod.

  Cove at Ogunquint, 1914. --  Cape Ann granite, 1928 -- The-Lighthouse-at-Two-Lights, (Le Phare de Two-Lights), 1929. -- Corn Hill Truro, Cape Cod, 1930. -- Prospect Street Gloucester, 1928, aquarelle -- Road and Houses, South Truro, Route et maisons South Truro, 1930-33.
  Cove at Ogunquint, 1914. --  Cape Ann granite, 1928 -- The-Lighthouse-at-Two-Lights, (Le Phare de Two-Lights), 1929. -- Corn Hill Truro, Cape Cod, 1930. -- Prospect Street Gloucester, 1928, aquarelle -- Road and Houses, South Truro, Route et maisons South Truro, 1930-33.
  Cove at Ogunquint, 1914. --  Cape Ann granite, 1928 -- The-Lighthouse-at-Two-Lights, (Le Phare de Two-Lights), 1929. -- Corn Hill Truro, Cape Cod, 1930. -- Prospect Street Gloucester, 1928, aquarelle -- Road and Houses, South Truro, Route et maisons South Truro, 1930-33.
  Cove at Ogunquint, 1914. --  Cape Ann granite, 1928 -- The-Lighthouse-at-Two-Lights, (Le Phare de Two-Lights), 1929. -- Corn Hill Truro, Cape Cod, 1930. -- Prospect Street Gloucester, 1928, aquarelle -- Road and Houses, South Truro, Route et maisons South Truro, 1930-33.
  Cove at Ogunquint, 1914. --  Cape Ann granite, 1928 -- The-Lighthouse-at-Two-Lights, (Le Phare de Two-Lights), 1929. -- Corn Hill Truro, Cape Cod, 1930. -- Prospect Street Gloucester, 1928, aquarelle -- Road and Houses, South Truro, Route et maisons South Truro, 1930-33.
  Cove at Ogunquint, 1914. --  Cape Ann granite, 1928 -- The-Lighthouse-at-Two-Lights, (Le Phare de Two-Lights), 1929. -- Corn Hill Truro, Cape Cod, 1930. -- Prospect Street Gloucester, 1928, aquarelle -- Road and Houses, South Truro, Route et maisons South Truro, 1930-33.
  Cove at Ogunquint, 1914. --  Cape Ann granite, 1928 -- The-Lighthouse-at-Two-Lights, (Le Phare de Two-Lights), 1929. -- Corn Hill Truro, Cape Cod, 1930. -- Prospect Street Gloucester, 1928, aquarelle -- Road and Houses, South Truro, Route et maisons South Truro, 1930-33.

Cove at Ogunquint, 1914. -- Cape Ann granite, 1928 -- The-Lighthouse-at-Two-Lights, (Le Phare de Two-Lights), 1929. -- Corn Hill Truro, Cape Cod, 1930. -- Prospect Street Gloucester, 1928, aquarelle -- Road and Houses, South Truro, Route et maisons South Truro, 1930-33.

House by the Railroad, 1925.

Cet étrange tableau, exposé dès l’année de sa création, est immédiatement un succès artistique et commercial. Une sensation vaguement angoissante émane de cette demeure victorienne, qui se dresse au-dessus du chemin de fer. La lumière du soleil inonde la façade et projette des ombres profondes sur le mur de côté. La base de la maison ainsi que les portes sont invisibles, pas de végétaux, aucune présence humaine et pourtant la maison semble humanisée, les fenêtres aux stores plus ou moins baissés animent cette façade et évoquent des yeux. Les cheminées orange la dynamisent …

 

« Tout oppose l’espace de la maison et celui des rails : les lignes bien verticales de la maison et celles presque horizontales des rails mais aussi des tonalités entre les couleurs froides utilisées pour la maison et les couleurs chaudes de la voie ferrée. Le peintre oppose également l’élément immobile qu’est la maison avec la représentation des rails qui suggèrent la possibilité d’un déplacement, d’un mouvement. Il fait ici le portrait d’une maison qui s’impose par sa simplicité et son isolement. Hopper se montre nostalgique face à une Amérique où la modernité est venue détruire la nature. Pourtant, […] on peut penser que la voie ferrée apporte aussi le progrès, au premier plan elle semble la base d’une nouvelle fondation pour la société américaine. Le chemin de fer a eu une grande importance dans la construction de l’Amérique, permettant l’expansion vers l’ouest et la transformation industrielle. C’est tout le paradoxe de l’histoire de l’Amérique, tiraillée entre la glorification du progrès et la nostalgie des grands espaces sauvages, que ce même progrès contribue à faire disparaître. »

L’atmosphère étrange de cette toile, le cadrage resserré proche des procédés employés au cinéma ont inspiré Alfred Hitchcock. En réutilisant le jeu des lignes verticales et horizontales de la maison et du motel, il en a fait le modèle du manoir effrayant habité par l’inquiétant Norman Bates, interprété par Anthony Perkins, dans Psychose en 1960.

Girl at Sewing Machine, 1921.

Dans un intérieur urbain, une jeune femme assise est concentrée sur son ouvrage devant une machine à coudre. Face à elle, une fenêtre laisse entrer la lumière d'une belle journée ensoleillée. Les rayons pénètrent puissamment dans l'intérieur, se projetant sur le mur, l’ouvrage et la robe blanche. Ses cheveux longs cachent en grande partie le visage. Composition bien construite entre les verticales de la fenêtre et de la coiffeuse et les diagonales parallèles des rayons lumineux, de la chevelure et de l’avant-bras de la jeune femme. Ce tableau rappelle des scènes d’intérieur de la peinture hollandaise. Sous la simplicité apparente de cette scène quotidienne, le tableau livre des détails intéressants : mobilier intérieur, flacon, petit cadre, briques jaunes encadrant la fenêtre sur la façade à l’extérieur, …

Chop Suey, 1929.

Deux femmes sont assises à la table d’un restaurant. Couleurs vives et éclairage intense par la fenêtre. L’enseigne du restaurant chinois est visible à l’extérieur. Ce tableau rappelle les scènes de café de Van Gogh et Manet réactualisées dans le contexte américain. Pulls moulants, chapeaux cloche et visage maquillé, ces deux femmes à la mode, dînant seules dans un restaurant, témoignent d’une certaine indépendance. Dans les années 1920, la montée du féminisme fait évoluer la société américaine. Par les formes géométriques, la composition rigoureuse, il se dégage une impression d’étrange tranquillité. Chacune des femmes semble plongée dans ses pensées, le couple à l'arrière-plan semble tout aussi peu communicatif.

 

 

Compartiment C, voiture 293, 1938.

Une femme élégante, vêtue d'une robe de couleur prune lit un magazine dans le compartiment d'un train. L’intérieur est entièrement vert, l'appuie-tête blanc, sa base violacée. Par la fenêtre un paysage nocturne, les arches d’un pont blanchâtre. La palette de couleur est réduite, les différentes teintes vertes, somptueuses, les blancs de la lampe, du magazine, et les noirs, sont réchauffés par les détails orangés du soleil couchant, de la chevelure, du visage et des jambes de Jo, toujours son unique modèle féminin. Les grands aplats de couleur simplifie à la fois l'intérieur du compartiment ainsi que les éléments naturels à l'extérieur, lisière d'arbres, talus et pont de chemin de fer. Les traits de la jeune femme à peine esquissés et cachés en partie par le chapeau en font un personnage universel de voyageuse solitaire.

Two on the Aisle, (2e rang d’orchestre), 1927. --- Cinéma à New York, 1939.

Grâce à l’angle de vue choisi, à la construction géométrique de la scène représentée, à la vivacité des couleurs, à l’éclairage marqué, et à l’importance des ombres, Hopper rend extraordinaires des endroits pourtant communs (théâtre, restaurant, bar …).  Les figures humaines, quant à elles, sont représentées plongées dans leurs pensées, dans leur lecture.

Gas, (Station-service), 1940.

Alors que le soir tombe, un homme s’affaire à une pompe. La station essence Mobilgas très éclairée est située au bord d’une route, à la lisière d’une forêt. A droite du tableau, la modernité : pompe, éclairage électrique puissant, s’oppose à la nature à gauche : forêt de pins verts, d’herbes jaunes et rougeâtres, et lumière du crépuscule. Séparant les deux mondes, la route de campagne déserte s’enfonce dans la forêt. Au milieu du tableau, les pompes rouges sont dressées, lumineuses, presque anthropomorphes. Elles sont des éléments indispensables pour l’automobile, qui devient symbole de « l’American Way of life », le mode de vie américain de ces années prospères.  Elles sont entretenues par un homme solitaire en chemise, cravate, il tourne le dos à la nature et semble « happé » par la machine et le progrès.

Nighthawks, (Oiseaux de nuit),1942, Chicago.

Dans cette œuvre, certainement la plus célèbre, Hopper illustre la solitude dans la vie urbaine. Remarquable composition encore, ce bar transparent, très éclairé, situé au croisement de rues sombres, permet de voir à la fois l’extérieur et l’intérieur. Vue de face, la jeune femme rousse est sans doute Jo, son épouse qui servait toujours de modèle. Son voisin, costume sombre, chemise bleue, chapeau gris, tient une cigarette en mains. Le serveur avec sa toque blanche observe l’homme de dos au centre, accoudé au bar, à l’allure énigmatique. Isolées de l’extérieur, les personnes le sont aussi à l’intérieur les unes par rapport aux autres. Derrière la sobriété apparente de ce tableau, se cache une réelle complexité dans la représentation de la paroi transparente du bar et un grand soin du détail : la caisse enregistreuse dans la boutique vide en face, les tabourets, les verres sur le bar, les percolateurs, la porte orange, …  La fascination pour cette toile est réelle et de nombreux artistes se la sont appropriée pour la revisiter, remplacer les personnages par Marilyn, James Dean…

Eleven, A.M., 1926. --- Sunday (Dimanche) 1926.  --- Hotel Room, (Chambre d’hôtel), 1931. --- Morning in a City, 1944. --- Morning Sun, 1952. –
Eleven, A.M., 1926. --- Sunday (Dimanche) 1926.  --- Hotel Room, (Chambre d’hôtel), 1931. --- Morning in a City, 1944. --- Morning Sun, 1952. –Eleven, A.M., 1926. --- Sunday (Dimanche) 1926.  --- Hotel Room, (Chambre d’hôtel), 1931. --- Morning in a City, 1944. --- Morning Sun, 1952. –
Eleven, A.M., 1926. --- Sunday (Dimanche) 1926.  --- Hotel Room, (Chambre d’hôtel), 1931. --- Morning in a City, 1944. --- Morning Sun, 1952. –Eleven, A.M., 1926. --- Sunday (Dimanche) 1926.  --- Hotel Room, (Chambre d’hôtel), 1931. --- Morning in a City, 1944. --- Morning Sun, 1952. –

Eleven, A.M., 1926. --- Sunday (Dimanche) 1926. --- Hotel Room, (Chambre d’hôtel), 1931. --- Morning in a City, 1944. --- Morning Sun, 1952. –

Isolement de l’homme assis au bord de la rue déserte un dimanche matin, solitude de la jeune femme songeuse face à une fenêtre dans un intérieur sobre (chambre d’hôtel ?), face à l’image, chacun peut construire son propre récit… L’éclairage intense partout accentue encore l’impression de silence. Les fenêtres créent les passages intérieur-extérieur. Le modèle est, comme toujours, Joséphine, son épouse. Malgré des traits souvent à peine esquissés, le passage du temps est perceptible sur le corps de Jo.

New York Pavements, (Trottoirs new-yorkais), 1924. --- Summertine, (Eté), 1943.

Dans Eté, réalisé en 1943, il reprend les éléments d’architecture de Trottoirs new-yorkais peint en 1924. Pourquoi cette bonne sœur court-elle avec un bébé dans une poussette ?  Dans Eté, la jeune femme attend sur la première marche de l’escalier. Placée au centre, sa chevelure rousse, la transparence de sa robe, la carnation de sa peau contraste avec cette architecture rigide, austère et grise du perron à colonnes, typique des grandes villes américaines. Le rideau qui bouge fait écho à la robe légère. Elle est belle, élégante, et son personnage introduit la vie dans cet environnement à la fois ensoleillé et désert. Comme dans la plupart de ses tableaux, chacun peut imaginer librement l 'histoire.

 

Room in New York, 1932. --- Summer Evening, 1947 --- Sunlight in a Cafeteria, 1958.

 

Dans Chambre à New York, par la fenêtre ouverte, on voit à l’intérieur de la pièce, un couple dans un salon bourgeois. L’homme lit le journal, la femme joue quelques notes au piano, plongée dans ses pensées. Leurs visages à peine esquissés, sont sommairement modelés par la lumière artificielle venant d’en haut. Dans Soir d’été, nous assistons à cette scène intime du jeune couple, ... Hopper transforme le spectateur, en voyeur parfois même en « l’incluant » dans l’espace comme dans la cafétéria où ces deux inconnus semblent dissimuler subtilement leur intérêt l’un pour l’autre.

Office at Night, La Nuit au bureau,1940 --- New York Office, Bureau à New York, 1962.

Au travail comme dans les loisirs, les lieux sont épurés, les angles de vue singuliers, peints avec des grands aplats de couleur. Au fil du temps, la tenue vestimentaire des personnages, plus particulièrement féminins, permet de suivre l’évolution de la mode. Tel un mannequin dans une vitrine, la jeune femme en robe bleue, mise en valeur par l’éclairage, regarde intensément une enveloppe. Un téléphone est placé devant elle. Elle nous fait face. C’est comme si nous l’observions de la rue, par effraction, en étant de l’autre côté du trottoir sans avoir accès à son univers. Dans les grandes villes, les univers peuvent coexister tout en restant isolés l’un de l’autre sans pouvoir communiquer.

Les tableaux paraissent réalistes mais les œuvres d’Hopper sont des reconstructions, des recompositions de souvenirs, d’aperçus fugaces d’intérieurs éclairés lors de voyage en train ou de promenades dans la ville la nuit, des mises en scènes, des synthèses d’impressions … Il élimine les détails inutiles, suggère subtilement…

Rooms by the Sea, Chambres au bord de la mer, 1951.

Hopper épure de plus en plus ses tableaux, jusqu’à les réduire au strict minimum pour exprimer son profond ressenti. Le tableau représente un coin de pièce baigné de lumière, au bord de l’océan. A gauche, une autre ouverture laisse entrevoir la pièce voisine, son tapis vert, un canapé rouge, un tableau accroché sur le mur du fond, éclairé aussi par les rayons du soleil. Intrigantes limites entre intérieur et extérieur, entre la pièce fermée et le paysage marin infini, entre réalité et imagination…

 

People in the Sun, Gens au soleil, 1960.

 

Cinq touristes prennent le soleil sur la terrasse d’un hôtel et contemplent un champ de blé et des collines lointaines. Quatre personnages, alignés en décalé, sont habillés et n’offrent que leurs visages au soleil. La lumière est forte, les ombres longues. Poses statiques sur leurs transats, les différentes personnes regardent au loin, impassibles. Le cinquième personnage, un jeune homme, assis à l’arrière est plongé dans sa lecture, indifférent à son environnement. Scène qui parait familière et qui, pourtant, ne se situe nulle part en particulier. Ce paysage, qui évoque l’ouest américain, ressemble à un décor de cinéma.

Two Comedians, 1965.

Dernier tableau peint par Hopper, il se représente en Pierrot, tirant sa révérence avec Colombine, sur une scène de théâtre. Costumes blancs éclatants sur un fond bleu nuit. Ils savent tous les deux qu'ils sont à la fin de leur carrière, mais aussi de leur vie. Représentation émouvante mais pas triste, geste gracieux envers Jo, qu’il tient par la main, elle-même esquissant un geste pour le faire saluer.

Self-portrait, 1925-1930.

 

Hopper décède en 1967 à 85 ans, Joséphine, 10 mois plus tard.

Un grand merci à Jean Yves Bègue de nous avoir replongé dans l’univers fascinant d’Edward Hopper.

Prochaines rencontres avec Les Arts 57 :

 

Visite guidée de l’exposition :

"Voir le temps en couleur, les défis de la photographie »

à Pompidou, groupe complet.

 

Conférence : jeudi 17 octobre, au Temple de Longeville

« Banksy, artiste d’art urbain »

Soirée présentée par Catherine Bourdieu.

 

 Réservation obligatoire par mail ou tel.

lesarts57@gmail.fr   ou tél.   03 87 32 05 03 

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20 juin 2024 4 20 /06 /juin /2024 19:18
Notre-Dame de l’Épine, le moulin de Valmy, musée de la Princerie à Verdun..

Notre-Dame de l’Épine, le moulin de Valmy, musée de la Princerie à Verdun..

Tout le monde est au rendez-vous ce matin frais du 1er juin, salle polyvalente de Saulny. Nous sommes 46 à nous installer dans le bus. Assis, ceintures bouclées, notre chauffeur Patrice peut démarrer, il est 8h. Après une petite pause confort sur l’aire de Valmy, la jolie basilique Notre-Dame de l’Epine apparait dans la campagne champenoise.

Première étape :  la Basilique Notre-Dame de lÉpine.

10h 30, sur le parvis nous attendent Aurélien et Sœur Marie-Estelle pour les visites guidées. Une communauté de 6 Bénédictines de l’ordre du Sacré Cœur de Montmartre est installée au prieuré au cœur du village. Les Sœurs travaillent en collaboration avec les prêtres et les laïcs qui font vivre le sanctuaire. Elles ont une mission de présence, d'accueil et de prière. Aurélien emmène le premier groupe à l’intérieur tandis que Sœur Marie-Estelle nous présente les origines et la façade extérieure du sanctuaire.

 

On raconte que des bergers, la veille de l'Annonciation, le 24 mars 1400, auraient découvert une statue de la Vierge à l'Enfant dans un buisson d'épines, dégageant une forte lumière. On est en pleine guerre de Cent ans, (1337 - 1453), le pays est ravagé, la région pauvre, beaucoup de bosquets, de buissons. Une chapelle dédiée à Marie existait. Les gens du village et des environs s’y rassemblent, elle devient un lieu de pèlerinage. 

La guerre et la peste qui sévissent expliquent en partie le regain de ferveur religieuse. On construit de nombreuses églises au Moyen Âge. Les offrandes des pèlerins apportent de la prospérité économique. Les pèlerinages deviennent encore plus importants si des reliques sont présentes, soit de saints locaux, soit des éléments plus prestigieux ramenés par les croisés. Elles servent de support de spiritualité nécessaire à l’intercession avec Dieu. La statuette de la Vierge à l’Enfant en pierre date du 13e- 14e siècle. Une tradition des « répits » de nourrissons s’est installée, c’est-à-dire le retour momentané à la vie d’enfants mort-nés, le temps de les baptiser. Cette pratique n’était cependant pas reconnue par l’église. L'Épine semble être resté un pèlerinage traditionnel et surtout un lieu de recours spécialisé dans les demandes en lien avec la maternité et la petite enfance.

Située à 8km de Chalons, elle est connue comme but de pèlerinage important en Champagne et au-delà, à partir de 1405. La construction de l'église actuelle débute vers 1406 et se poursuivra jusqu'en 1527 pour le gros-œuvre. Le chantier démarre par le milieu de l’église et se termine par la façade de style gothique flamboyant à deux tours. Elle comporte trois portails. Un grand Christ en croix, couronné d’épines, se détache devant une petite rose et une galerie flamboyante. Des décors végétaux nombreux et variés, feuilles de laitue, de choux ornent les sculptures.

Sur la tour sud, plus élevée, deux cercles de pierre sont couronnés de huit lys, à la fois symbole de la Vierge Marie et de la royauté. Après la guerre de Cent Ans, le roi Charles VII victorieux accompagné de son fils, le futur Louis XI, alors petit garçon, vinrent remercier la Vierge Marie. Plus tard, en 1471, Louis XI offrira 1200 écus d’or. La flèche nord, arasée en 1798, pour permettre l’installation d’un télégraphe Chappe, a été reconstruite en 1868, grâce à la générosité de Napoléon III. En remerciement, une couronne portant 8 aigles a été installée sur le tambour octogonal de la tour. Plus de 120 gargouilles médiévales remarquables protègent la basilique.

 

Avant de pénétrer dans la basilique, Sœur Marie-Estelle nous montre une pierre gravée en 1610 : les troupes royales stationnant au village ont été affectées par l’assassinat du roi Henri IV.

A l’intérieur, une plaque rappelle qu’en 1914 lors de la bataille de la Marne, il était question de détruire les flèches trop repérables pour l’ennemi, le capitaine Louis d’Hangouwart, en demandant un délai de réflexion, les sauva de la destruction.

 

La nef, voûtée d’ogives et dotée de fenêtres hautes, est d’une jolie couleur blonde caractéristique de la pierre de Savonnières (Meuse). Un superbe jubé délimite l’espace sacré. Datant du 15e siècle, il est surmonté d’une balustrade ajourée avec épines.

Il porte une poutre de gloire, érigée au 16e : un grand Christ en croix, couronné d’épines, avec, à ses pieds, les statues de Marie et Jean. A ses extrémités, la croix fleurit en fleurs de lys, signe annonciateur de la vie qui jaillit après la mort. Sur le jubé, les insignes de la clochette et du pavillon, donnés par le pape Pie X, rappellent que l’église de l’Epine a été élevée au rang de basilique en 1914. Lors de la visite d’un pape, son entrée est accompagnée avec la clochette et il est abrité sous le parasol ou pavillon. Tandis qu’une cathédrale est l’église principale d’un diocèse où se trouve une cathèdre, siège de l’évêque.

 

 

L’arcade droite du jubé abrite une niche contenant la copie de la statue de la Vierge du buisson. L’originale du 14e siècle est exposée lors des grandes fêtes mariales.

Etonnant, le puit creusé pour le chantier en 1406 est encore présent. Profond de 27m, on y puise encore de l’eau pour les baptêmes ou pour les fidèles qui souhaitent boire son eau, on lui prête des vertus de fécondité et de guérison.

Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.

 

A l’arrière du jubé, caché dans la décoration, un escargot choisit les tables de la loi plutôt que la feuille de salade, symbole de « la foi en progrès » car l’escargot ne recule jamais !  

Dans une des chapelles, une superbe Mise au tombeau provenant d’un couvent de Chalons, a ainsi été sauvé de la destruction à la Révolution. Ce groupe sculpté, aux personnages à taille réelle, est daté de 1550. Il représente la scène de l’ensevelissement du Christ, le soir du Vendredi Saint.

Nicodème et Joseph d’Arimathie l’ont détaché de la croix. Le Christ est étendu sur le linceul. D’une grande vérité anatomique, il a les mains posées sur le périzonium. Deux anges portent les instruments de la Passion : la tour de flagellation et la croix. Marie est soutenue par Jean, tous deux sculptés dans le même bloc de pierre. Deux saintes femmes et Marie-Madeleine aux longs cheveux, portent déjà les aromates pour embaumer le corps au matin de Pâques. Des larmes sont sculptées sur les visages. Tous les regards convergent vers le Christ. Malgré la douleur, cette sculpture dégage beaucoup de paix et de sérénité.  

Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.

Sœur Marie Estelle nous conduit devant un petit monument étonnant, voûté d’ogives : le trésor ou tabernacle - reliquaire daté de 1543. Les reliques y sont conservées parmi lesquelles un morceau de la Sainte Croix, un fragment de la grotte de la nativité rapportés de Terre Sainte par un pèlerin… La partie tabernacle abritait les hosties, coté interne. La fresque, côté externe, représente la Vierge Marie entourée de ses nombreux symboles bibliques, lys, rose, jardin clos, puits, palmier, tour de David, temple de Salomon, …A ses pieds, des offrandes dans un panier.

Notre-Dame de L'Épine a toujours frappé les voyageurs et inspiré les écrivains, en particulier Victor Hugo : « …surprise étrange de voir s’épanouir…dans ces champs, …cette splendide fleur de l’architecture gothique… »  (Lettre à un ami, 1842). Elle a été classée monument historique en 1840 et inscrite en 1998 sur la liste du patrimoine mondial par l'Unesco au titre des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle en France.

La visite guidée intérieure terminée, nous avons encore un peu de temps pour admirer l’extérieur et ses gargouilles incroyables, « particulièrement compliquées et curieuses. Elles se composent de deux monstres dont l’un porte l’autre sur les épaules… » Victor Hugo, Lettre à un ami, 1842.

Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.

A 11h30, nous rejoignons le bus garé sur une petite place, pour nous rendre au restaurant « La Victoire » à Valmy. Convivialité et bonne humeur sont au rendez vous de ce repas dont le chef, d’origine grecque, a proposé des assiettes généreuses. 

Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.

Deuxième étape :  Valmy.

Repas si agréable que nous avons pris un peu de retard sur l’horaire prévu, 14h passées, il est temps de nous rendre sur le site historique de Valmy. Invisible de loin, le centre d’interprétation, semi-enterré, est construit à même le flanc de colline. Il préserve ainsi le panorama à 360° dont le point culminant demeure le moulin. Maîtrise d’œuvre et scénographie ont été confiées à l’architecte Pierre-Louis Faloci.  

Une entaille dans la butte nous conduit vers « Valmy 1792 ». Arrivés dans le hall d’accueil, deux groupes se reforment, l’un démarre par le centre d’interprétation, l’autre se rend au moulin. Le musée propose un parcours expliquant les enjeux et le déroulement de la bataille.

Le couloir chronologique rappelle le contexte politique et social de la France, le long duquel des alvéoles évoquent différents thèmes. La première concerne : le Paris révolutionnaire : prise de la Bastille, Déclaration des droits de l’Homme, fuite à Varennes…

Les modules suivants présentent la mise en place des troupes, l’équipement des soldats, des collections d’armes… Les uniformes français sont soit blancs pour les soldats professionnels (royaux) soit bleus pour les soldats volontaires (moins expérimentés). Le point d’orgue de la visite est certainement la magnifique maquette animée de 4 x 2,50 m, restituant la topographie des lieux. Elle reconstitue les mouvements des troupes depuis les premières heures de la bataille jusqu’au crépuscule. L’ambiance des combats est simulée par des détonations. La stratégie des généraux très bien expliquée, les signes et politesses entre gens bien éduqués pour envoyer les hommes au front est étonnante.

En 1791, sous la pression de l’aristocratie française émigrée et craignant que les idées révolutionnaires ne se propagent à toute l’Europe, Léopold II d’Autriche et Frédéric Guillaume II de Prusse enjoignent le peuple de France à ne pas attenter à la souveraineté de Louis XVI. Cette annonce passe pour une provocation. Au grand étonnement de toute l’Europe, l’Assemblée nationale française déclare la guerre au « roi de Bohème et Hongrie », Léopold, aussi Empereur du Saint Empire Romain Germanique en avril 1792.

Brunswick - Kellermann – Dumouriez.

Au mois de septembre 1792, les troupes austro-prussiennes commandées par le duc de Brunswick prennent la direction de Paris. La coalition progresse rapidement et arrive à hauteur de Sainte-Ménehould. Plus rien ne semble pouvoir arrêter leur progression jusqu’à Paris. Sur ordre de l’Assemblée nationale, le général Dumouriez, à la tête de l’armée du Nord (30 000 soldats), réagit et élabore un plan de bataille audacieux. Le général Kellermann (armée du Centre, 35 000 hommes) le rejoint. L’objectif : couper les Prussiens de leur précieux ravitaillement venant de Verdun et les forcer à mener combat en Argonne. Le 20 septembre 1792, le théâtre des opérations est fixé : Brunswick affrontera les armées de Dumouriez et Kellermann sur les hauteurs du village de Valmy.

Galvanisés par l’enthousiasme de Kellermann au cri de « Vive la nation » et soutenus par les puissants canons Gribeauval, les révolutionnaires maintiennent leurs positions et contre toute attente, tiennent en échec la coalition. La bataille est perdue pour les Prussiens. Goethe, présent sur le champ de bataille écrira que « de ce lieu, de ce jour, date une nouvelle époque de l’histoire du monde ». La 1ère République est proclamée à Paris le lendemain, le 21 septembre 1792.

Goethe, présent sur le champ de bataille écrira que « de ce lieu, de ce jour, date une nouvelle époque de l’histoire du monde ». La 1ère République est proclamée à Paris le lendemain, le 21 septembre 1792.

Pièce d’artillerie rare : le fameux canon Gribeauval est exposé. Il ne reste que très peu d’exemplaires complets (affût en bois et tube métallique) dans le monde. Ce type de pièce était utilisé par l’armée française lors des guerres de la Révolution puis dans les armées napoléoniennes. Derrière la baie vitrée, on aperçoit le moulin de Valmy.

Le canon Gribeauval - Le moulin de Valmy.

La bataille de Valmy est restée dans la mémoire populaire pour sa charge symbolique. Elle a vu s’affronter deux visions du monde : d’un côté la monarchie absolue incarnée par l’Autriche et la Prusse, de l’autre la liberté et l’égalité des droits affirmées par la Révolution Française. 

Le temps imparti pour la visite du centre historique terminé, le parcours du groupe se poursuit au pied du moulin, au sommet de la butte.

Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.

Pauline nous accueille au moulin. Nous admirons ce superbe panorama à 360°, site de la bataille. C’est le 4ème moulin depuis la construction du moulin originel au XVIe siècle. Les moulins à vent permettaient la transformation du grain en farine, il y en avait un tous les 10km environ. Point de repère idéal pour l’armée adverse, il est détruit pendant la bataille de Valmy sur ordre de Kellermann. Le meunier sera indemnisé, son moulin reconstruit. Cependant, ce moulin à vent n’a pas pu soutenir la concurrence des moulins à eau qui se multiplient au début du XIXe siècle. Il est rasé. Plus tard, Valmy devient un lieu de mémoire, symbole de la victoire de la Révolution. En 1947, un nouveau moulin venu des Flandres est inauguré … mais balayé par la tempête de 1999.

En 2005, un nouveau moulin sur pivot, construit dans les ateliers de Villeneuve d’Ascq, est inauguré. Contrairement aux moulins provençaux dont le toit tourne avec les ailes, pour celui-ci, c’est toute la structure qui tourne. Pour mettre les ailes au vent, il est orientable par la poutre de l’escalier, la cage tourne, l’escalier suit. Sa forme plus trapue est typique des moulins de Champagne au XVIIIe siècle, différente des moulins flamants plus élancés. Son mécanisme est complet, parfaitement fonctionnel et peut produire la farine. Il est mis en mouvement et ouvert au public quatre fois dans l’année : à Pâques, en mai, au 14 juillet et aux journées du patrimoine. Malheureusement, ses ailes sont tombées en 2022, victimes d’un champignon qui a rongé la tête de l’arbre moteur. Une équipe d’architectes travaille à leur reconstruction qui devrait se concrétiser en 2025. Ils réfléchissent à un dispositif permettant d’évacuer l’humidité et ferait tourner plus régulièrement les ailes. 

Les ailes sont portées par un énorme arbre en chêne provenant de la forêt d’Orléans. Elles ne tournent que recouvertes de toile. Un ingénieux système de cordages pour monter les sacs de grain, des roues dentées en bois, pignon, lanterne désaxée qui entraine la meule tournante sur la meule dormante, une trémie pour vider le grain entre les meules, un deuxième système à couteaux dans un tonneau de brassage pour obtenir une mouture plus fine… témoignent d’un magnifique travail de conception, de réalisation et de travail du bois !

Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.

Pauline est passionnante mais l’horloge tourne, nous n’avons plus le temps de nous rendre au monument de Kellermann : une statue en bronze représentant le général victorieux, bicorne en main, et sabre au poing. Il souhaitait que son cœur repose là où il a mené sa plus grande bataille, il est conservé dans un petit obélisque à proximité, son corps se trouve au cimetière du père Lachaise. Sur le parcours, un petit monument abrite les cendres de la princesse Ginetti, son arrière-petite-fille qui a beaucoup œuvré pour honorer la mémoire de son aïeul.

 

Troisième étape :  le musée de la Princerie à Verdun.  

Sous une fine pluie, nous rejoignons le bus. Un trajet d’environ 45 mn est nécessaire pour arriver à Verdun. Le musée de la Princerie est situé sur les hauteurs, dans la vieille ville. Approche difficile du bus, pour cause de travaux dans la ville, de sens interdits, … finalement garé en contrebas, il nous faut gravir à pied une montée pour parvenir au musée.

Cette ancienne bâtisse Renaissance est située à l’emplacement supposé de la maison du Princier. Le princier était jusqu’au 14e siècle le plus haut personnage religieux après l’évêque.Les chanoines De Musson construisirent en 1525 cette belle demeure avec cour et jardin d’agrément. Rachetée par la ville après la 1ère guerre, le musée y est installé depuis 1932. Tandis qu’un premier groupe démarre la visite intérieure, nous découvrons la cour, sa double galerie élégante aux arches en anse de panier. Elle accueille une impressionnante collection de taques de cheminées.

Guidé par Cindy, le deuxième groupe peut entrer. Le fond du musée était essentiellement composé d’animaux naturalisés et de minéraux. Depuis, les collections se sont enrichies par des pièces se rapportant à l’histoire de Verdun et de ses environs depuis la préhistoire jusqu’au XXe siècle.

Cette salle d’entrée présente des trésors médiévaux. Au centre, les gisants de François de Sainctignon et de son épouse, bailli de l’évêché de Verdun et chambellan du duc de Lorraine au 16e siècle. A leurs pieds, deux chiens allongés, symboles de fidélité. Dans la 1ère vitrine, un beau crâne sculpté en marbre attribué à Ligier-Richier (16e s.). Au fond, de belles statues médiévales ayant gardé leur polychromie d’origine en particulier saint Roch, saint guérisseur populaire invoqué contre la peste qui a durement frappé la Lorraine au 16e s. Touché lui-même, il en montre les signes sur sa cuisse.

Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.
Au lendemain de la sortie à l’Epine, Valmy et Verdun, le 1er Juin 2024.

Un remarquable peigne liturgique en ivoire, d’origine anglo-normande, finement sculpté en bas-relief, daté vers 1120, cet objet était utilisé uniquement par l’évêque avant un office religieux. Il aurait été offert à Henry de Winchester devenu évêque de Verdun en 1117.

Dans la petite chapelle gothique au fond, une rare Vierge à l’Enfant en bois polychrome provenant d’une église meusienne et datée du 12e s.

La salle suivante est consacrée à la préhistoire, de nombreux fossiles y sont exposés parmi lesquels une mâchoire de crocodilien, (jurassique, 150 millions d’années) une dent de mammouth, (paléolithique, -300 000à - 40 000 ans) … trouvés dans la carrière d’Haudainville (Meuse).  Différents outils provenant d’agriculteurs éleveurs trouvés dans des sites meusiens (néolithique, -6000 à -2000 ans) témoignent de l’implantation humaine très ancienne sur ce territoire.

Une autre salle dépeint Verdun et ses environs à l’époque gallo-romaine. Des objets de la vie quotidienne sont exposés des bijoux, accessoires de vêtements, colliers, torques, fibules, en bronze, objets en verre, en os, céramiques. Pour la partie mérovingienne, travail de l’or de l’argent, orfèvrerie d’une plus grande délicatesse, …

Nous pressons un peu le pas, le musée ferme normalement à 18h mais Cindy, nous offre généreusement du temps supplémentaire. A l’étage, une petite salle consacrée au mobilier lorrain, une autre à l’histoire de Verdun. Cité épiscopale au rayonnement important, elle est l’un des « Trois-Evêchés » avec Metz et Toul. Ville de garnison, rôle militaire mais aussi cité sur l’eau, Verdun a su exploiter la Meuse pour alimenter son commerce et ses activités artisanales et industrielles.

Edmond Petitjean, Verdun et la Meuse avant 1914, vers 1891.- Alfred Renaudin, Verdun en 1919, 1919. Louis Hector Leroux, Lesbie pleurant son moineau, 1868.
Edmond Petitjean, Verdun et la Meuse avant 1914, vers 1891.- Alfred Renaudin, Verdun en 1919, 1919. Louis Hector Leroux, Lesbie pleurant son moineau, 1868.
Edmond Petitjean, Verdun et la Meuse avant 1914, vers 1891.- Alfred Renaudin, Verdun en 1919, 1919. Louis Hector Leroux, Lesbie pleurant son moineau, 1868.
Edmond Petitjean, Verdun et la Meuse avant 1914, vers 1891.- Alfred Renaudin, Verdun en 1919, 1919. Louis Hector Leroux, Lesbie pleurant son moineau, 1868.

Edmond Petitjean, Verdun et la Meuse avant 1914, vers 1891.- Alfred Renaudin, Verdun en 1919, 1919. Louis Hector Leroux, Lesbie pleurant son moineau, 1868.

 

L’ Allégorie de Verdun, sculpture en plâtre de Henri Frédéric Varenne, maquette préparatoire pour celle située sur le fronton de la gare de l’Est à Paris. Femme casquée tenant épée et bouclier aux armes de la ville.1929.

Emblème de la ville, la dragée est née à Verdun au XIII e s. Afin d’améliorer la conservation et le transport des amandes, un apothicaire eut l’idée de les enrober de sucre. Très vite, elle devient une friandise luxueuse prisée à la cour. Les boites et leurs couvercles peints à la main par des artistes devenaient des objets au décors raffinés, particulièrement appréciés. Au 19e s., 72 tonnes de dragées sont produites chaque année par trois fabriques Lizer-Mayeur, Baudot et la plus célèbre Braquier.

 

 

La cristallerie Model développe un art verrier original à partir de 1930 : opalescence, effet de givre…

 

 

 

Les salles suivantes présentent peintures, dessins, accrochage temporaire, travaux d’enfants en collaboration avec les écoles … Le fonds de peinture est constitué par des portraits d’apparat des 17e s. et 18e s., des œuvres peintes au 19e s. par des artistes locaux : Hector Leroux ou Jean-Jacques Henner et Jules Bastien -Lepage, particulièrement apprécié !

Composition pyramidale, la jeune fille songeuse aux traits idéalisés, entourée de putti sont des éléments issus de l’enseignement académique. Cependant de nombreux détails témoignent d’une recherche de réalisme dans le travail de Jules Bastien-Lepage. La position assise avec lassitude, les habits de travail, mains sales et pieds nus de l’enfant témoignent d’une journée de labeur. Une grande attention est portée à la représentation du paysage, arbres et fleurs de la campagne meusienne, et, en arrière- plan, le village-rue typiquement lorrain. Cette œuvre est un bon exemple des influences multiples du peintre, qui se détache de l’enseignement classique pour tendre vers plus de naturalisme.

Jules Bastien -Lepage, La Chanson du printemps, 1874. (Présentée au Salon de 1874.)

Une exposition temporaire « correspondances » propose de renouveler le regard de certaines œuvres à travers une approche différente, plus sensible. Certains tableaux anciens sont associés à des œuvres contemporaines dans une juxtaposition qui interroge, interpelle…

Guillaume Barth, Elina, 2015.

 

Cet artiste alsacien est tombé en admiration devant le désert de sel bolivien en 2013. Lors de pluie, la surface se transforme en miroir. Il photographie sa sculpture en briques de sel, 3 m de diamètre. Planète éphémère qu’il nomme Elina :  du grec Hélè pour le soleil et Na pour le sodium.

Auguste Migette, La Vallée de la Moselle.1859.

 

Des ruines antiques côtoient des bâtiments modernes dans des paysages semi-imaginaires. Les ruines de Trèves dévoilent la vallée de la Moselle et les restes antiques de Jouy. Fantaisie du peintre, ce tableau s’inscrit dans la tradition des caprices, genre pictural né en Italie au 18e s.

Ces deux grandes toiles placées à proximité l’une de l’autre, par exemple, questionnent sur l’imaginaire de ces deux artistes à des périodes différentes !  Ce petit musée mérite qu’on s’y attarde davantage, d’autant que l’accueil y a été très bienveillant malgré le dépassement horaire.

Chacun à son rythme, nous redescendons pour retrouver notre bus par des chemins différents et découvrons des aspects de la ville de Verdun qui rappellent de bons souvenirs à certaines qui connaissaient bien les lieux. Préparée par Catherine, que nous remercions encore, cette belle journée si conviviale, intéressante, à la découverte de ce patrimoine pas si éloigné, a beaucoup plu à tous les participants.

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31 mai 2024 5 31 /05 /mai /2024 15:47

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« Image du film La sortie de l’usine Lumière à Lyon ». Photogramme de Louis Lumière, 1895.

 

C’est la troisième rencontre organisée par LesArts57 dans le cadre de l’anniversaire des 150 ans de l’impressionnisme, cette fois sur les liens avec le cinéma, et présentée par Caroline RENOUARD. Dans cette belle salle de Lorry, Martine accueille la quarantaine de participants et nous présente Mme Renouard, Maîtresse de conférences en études cinématographiques à l'Université de Lorraine, spécialisée en esthétique, histoire du cinéma, effets spéciaux, …

Quelques temps après la conférence « Cinéma et impressionnisme », le 16 mai à Lorry les Metz.

Pour approcher le cinéma impressionniste, ce courant avant-gardiste du cinéma français muet des années 20, et comprendre les origines du cinéma, il est nécessaire de se replonger dans le contexte et l’ambiance de l’époque. Entre 1880 et 1890, période très riche en expérimentations pour créer des vues animées, de nombreux brevets de dispositifs visuels sont déposés, mais ce sont les frères Louis et Auguste Lumière qui imposent un modèle efficace : le cinématographe, machine révolutionnaire, en 1895.

Capturer la lumière, saisir l’instant fugace, suggérer le mouvement était aussi une préoccupation majeure des peintres et photographes depuis le milieu du 19e siècle.

Claude Monet, Extrait série sur la gare Saint-Lazare, 1877.

Claude Monet, Extrait série sur la gare Saint-Lazare, 1877.

Monet, en plantant son chevalet sur les quais, dans la gare Saint-Lazare, matérialise sur la toile les effets atmosphériques, la sensation éphémère qu’il perçoit. Le mouvement des locomotives qui arrivent, rejetant des nuages de vapeur, on ressent toute l’activité de la gare.

 

Avant lui, Turner en Angleterre avait aussi choisi de représenter le train. Effets de perspective, flou, … la vitesse de la locomotive est déjà perceptible. Symbole de modernité en harmonie avec le paysage, le train relie ville et campagne, ère industrielle et ruralité traditionnelle.

 

William Turner, Pluie, vapeur, et vitesse, 1844, National Gallery, Londres.

A Etretat, ou devant la cathédrale de Rouen, Monet fixe son cadrage. Sur différentes toiles, du même point de vue, il cherche à représenter les changements de lumière au cours de la journée, des saisons, il pose rapidement sa peinture par petits paquets colorés. Les vibrations obtenues semblent rendre la peinture vivante.

Claude Monet, Extrait série sur les falaises d’Etretat (1883-1886).

La succession des images dans ses séries, donnent l’illusion du temps qui s’écoule sur une journée, sur les saisons… Leur multiplicité, l’enchainement des vues, permet de comprendre l’accélération du temps et prépare déjà le regard à la mise en mouvement d’images.

Claude Monet, Extrait série sur la cathédrale de Rouen (1892-1894).

Les photographes vont, eux aussi, essayer de capturer le mouvement image par image. C’est l’Américain Eadweard Muybridge qui invente la chronophotographie, procédé, repris et amélioré par le Français Jules Marey. En 1878, Muybridge dispose 24 appareils avec opérateurs le long d’une piste équestre et réussit à obtenir les clichés d’un cheval au galop.

Quelques temps après la conférence « Cinéma et impressionnisme », le 16 mai à Lorry les Metz.
Théodore Géricault, Le Derby d’Epsom, 1821, Louvre.

 

Il confirme qu’il n’y a pas décollage des quatre fers lors des phases d’extension du cheval au galop (le décollage intervient, en fait, lors de la phase de regroupement), ce qui montre la conception erronée de la représentation du galop dans certains tableaux.

Marey, physiologiste passionné par la locomotion humaine et animale, simplifie le dispositif en un seul appareil, le fusil photographique en 1882. Il permet de linéariser sur une même plaque le déplacement du sujet, il saisit, par exemple, l’oiseau en plein vol à 12 images par seconde. Ces inventeurs permettent de décomposer le mouvement image par image mais aussi à l’inverse de le recomposer ! c’est le pré-cinéma, ils ont inventé les prémices de la caméra. Meissonnier, impressionné par la démonstration de Muybridge, aurait modifié certaines de ses scènes historiques. Degas, s’inspira de Marey pour peindre les danseuses dans différentes positions avec des gestes plus spontanés et justes. 

En cette fin de 19e, peinture, sculpture, et photographie ont sensibilisé le regard du spectateur et l’ont préparé à l’analyse.

Un des premiers à inventer une machine pour visualiser les images animées est l’américain Thomas Edison dans les années 1888-1890. Le kinétoscope se présente sous la forme d’une boite dans laquelle se déroule une petite scène de quelques secondes pour 1 seul spectateur.  Il remporte un grand succès dans les grandes villes américaines en montrant des petits films de quelques secondes, Buffalo Bill, des matchs de boxe par exemple. Sur des machines alignées, les films sont montrés en épisodes nécessitant la mise d’un sou pour chaque séquence !

Auguste et Louis Lumière.

 

À Paris, à l’automne 1894, Antoine Lumière est émerveillé par le Kinétoscope d’Edison. De retour à Lyon, il demande à ses fils, Louis et Auguste, de se consacrer à l’étude d’un dispositif pour en faire un spectacle plus collectif. En s’inspirant de la « lanterne magique », les frères fabriquent le cinématographe, appareil qui est à la fois caméra de prise de vue et projecteur de cinéma. Il fait avancer le film perforé comme dans une machine à coudre à 16 images par seconde grâce à une manivelle. Plus léger que le kinétoscope individuel d’Edison, il est portable et permet aux opérateurs de filmer sur le vif, hors des studios tout comme les peintres impressionnistes hors des ateliers.

 

 

Le premier film tourné est La Sortie de l'usine Lumière à Lyon. Après quelques représentations privées, le 28 décembre 1895, ils organisent à Paris au Grand café, bd des capucines, la première projection publique payante (PPPP) devant une trentaine de personnes dont Georges Méliès.

Cette séance comporte 10 petits films dont Le Repas de bébé. D’abord une image fixe, puis l’appareil se met en marche avec le bruit du projecteur. Si les spectateurs regardent, fascinés, cette simple scène familiale où la vie s’anime devant eux, tous les regards sont abasourdis par l’arrière-plan où s’est invité, par hasard, un vent qui fait vigoureusement bouger le feuillage des arbres !

Le Repas de bébé, 1895.

« quelque chose semble échapper [au] beau souci de composition [de Louis] : le vent … fait danser les plantes et les arbustes derrière Auguste et Marguerite … le couple et leur enfant devaient être les seuls objets d’attention dans cette composition ; le mouvement de l’image devait être celui des « sujets » au premier plan, aux gestes convenus, mesurés, qui devaient eux-mêmes être les agents de la révélation d’un autre mouvement : celui de la technique de défilement mise au point par les deux frères lyonnais. Mais le vent en a décidé autrement. » Benjamin Thomas, L’attrait du vent, 2016.

Les références à la peinture impressionniste dans les films Lumière sont nombreuses, le choix des sujets, la danse des enfants (film renoirien), les enfants qui plongent sur le ponton et deviennent hors champs. Ils cherchent à proposer une impression de réel, de simplicité et fragilité de la vérité. Contrairement à Edison qui tourne dans les studios de la Black Maria et met du temps à réaliser les films, les opérateurs Lumière vont sur site et saisissent des images éphémères, fugaces, surgies du hasard. Ils explorent le monde du travail, des loisirs, les progrès industriels… 

 

Les voyageurs attendent sur le quai, la locomotive apparaît et semble foncer vers le spectateur, puis file à gauche au premier plan, et sort du cadre. Le train s’arrête. Les voyageurs se dirigent vers les wagons. La foule qui en descend remplit le quai, une femme au chapeau traverse l’écran … le cadrage est fixe, les personnages par leurs déplacements indiquent la profondeur de champs.

L’ Arrivée du train en gare de la Ciotat, 1896-1897.

« Le bord [du cadre] est ce qui limite l’image, ce qui la contient, … le coup de génie ici est d’avoir au contraire laissé l’image déborder : la locomotive, les figurants transgressent cette limite (la transgressent, … ne l’abolissent pas). … c’est grâce à cette activité aux bords de l’image que l’espace semble se transformer incessamment. » Jacques Aumont, à propos de L’ Arrivée du train en gare de la Ciotat. L'Œil interminable : cinéma et peinture [1989], éditions La Différence, 2007 (2e édition). Chapitre "Lumière, le dernier peintre impressionniste", p.40.

La composition des séquences était organisée, leur mise en scène précise : lors de la sortie d’usine les ouvriers semblaient endimanchés, dans une autre séquence, le bébé ne veut pas attraper les poissons dans le bocal malgré l’insistance d’Auguste qui finit par jeter un œil contrit et complice à la caméra, les forgerons ne portent pas leur tablier de travail, lors de l’arrivée du train, Mme Lumière fait partie des figurants et refait un passage ! les personnages s’activent, se savent filmés. Et autre hasard, de la fumée s’échappe sur le quai voisin, une autre locomotive démarre, saisie par la caméra !

Gustave Caillebotte, Le Pont de l’Europe, 1876. – Sur le Pont de l’Europe, 1877.

Gustave Caillebotte, Le Pont de l’Europe, 1876. – Sur le Pont de l’Europe, 1877.

La similitude avec les tableaux de Caillebotte est étonnante, son travail de perspective, les allers-retours du regard sur la toile, la question du cadre, de la place du hors champs, de l’avant champs. L’intensité de la vie urbaine le passionne, il nous inclut dans le tableau. Le passant s’arrête pour observer, penché sur la balustrade.

Autre point de convergence entre Caillebotte et les frères Lumière : la représentation du prolétariat urbain, plutôt une étude documentaire précise sur les gestes, les outils des raboteurs de plancher, des forgerons, ou des ouvriers réparant le bitume du trottoir.

Gustave Caillebotte, Les Raboteurs de parquet, 1875. – 1876.
Gustave Caillebotte, Les Raboteurs de parquet, 1875. – 1876.

Gustave Caillebotte, Les Raboteurs de parquet, 1875. – 1876.

Que ce soit Caillebotte derrière son chevalet ou l’opérateur Lumière derrière sa caméra, tous deux ont un regard valorisant les petites gens, leur dur labeur. Ils établissent un pont entre la science et l’art, l'exactitude et la rêverie poétique, l' utilité scientifique et l'esthétique !

 

L’impressionnisme, un courant cinématographique des années 1920 en France.  

En 1920 le cinéma en France est mis à mal, il n’existe plus personne pour faire des films. Les Etats-Unis inondent le marché de films hollywoodiens : Charlot…   Les cinéphiles essaient de se positionner par une nouvelle esthétique différente des films hollywoodiens et différente des expressionnistes allemands. Ce mouvement d’avant-garde se déploie de 1923 jusqu’à l’avènement du cinéma parlant vers 1928-29. Ce courant est ainsi nommé impressionnisme par opposition au courant expressionniste allemand. C’est le moment où le cinéma a l’ambition de se développer artistiquement et de passer du statut de média à celui d’art. Méliès parle de son art en 1907. D’abord considéré comme le 6ème art, la formule du 7ème art apparait en 1919. Ce cinéma cherche à utiliser une nouvelle grammaire cinématographique pour rentrer à l’intérieur de la psyché, rendre compte des impressions intérieures, des souvenirs, des rêves.

« La Roue », Abel Gance, 1923.

« La Roue », Abel Gance, 1923.

« La Roue », mélodrame d' Abel Gance,  met en scène un conducteur de locomotive, torturé psychologiquement. Le bébé qu’il a recueilli est devenu une jeune femme dont il tombe amoureux tout comme son fils et son patron. Il est si perturbé qu’il veut provoquer le déraillement du train. Le spectateur est embarqué dans cette course folle du train par les prises de vues accélérées, les séquences mécaniques où la machine et la roue deviennent obsédantes, les plans de plus en plus courts, de plus en plus déstructurés. Abel Gance introduit dans son film de nombreuses innovations techniques : surimpressions, accélération de l'image, coupes rapides, et donne beaucoup d’importance au montage et à la musique.

Explorer l’âme humaine est révolutionnaire dans les années 1920.  (Hitchcock le fera plus tard). « Une autre période s’est ouverte, celle du cinéma psychologique et impressionniste » qui visualise le « jeu des pensées et des sensations » selon Germaine Dulac.  Les films impressionnistes se détachent du narratif, du théâtral, deviennent poétiques. Germaine Dulac, seule femme cinéaste, recherche un cinéma pur, se libère du scénario, veut explorer les sensations visuelles (comme Monet dans ses nymphéas).

Cœur fidèle, Jean Epstein, 1923 – Le Lion des Mogols, Jean Epstein, 1924.

Cœur fidèle, Jean Epstein, 1923 – Le Lion des Mogols, Jean Epstein, 1924.

Jean Epstein, cinéaste, revendique, lui, le lien au pictorialisme. Dans ses films il travaille sur les substances, rend des images grumeleuses sur les visages, les paysages… Il introduit des effets visuels (flous, surimpressions…), joue sur les panoramiques, les gros plans, le montage rapide. Fasciné par les voitures et par l'ivresse que procure la vitesse, le film Le lion des Mogols montre une spectaculaire séquence de course folle en automobile sur les grands boulevards parisiens, illustrant la douleur et la folie du personnage.

« Pour Jean Epstein, l’essentiel du cinéma est ce mystère de la captation de l’image … l’objectif du cinéma … permet … à la faveur du montage … d’atteindre à un relief qui est celui des quatre dimensions » Henri Langlois.

 

 

Conférence passionnante, et bien servie par l'équipement technique de la salle,  Me Renouard nous a permis de découvrir les prémices de ce 7 ème art qui s’inscrit dans la continuité de la peinture impressionniste, de la photographie pictorialiste, et poussant toujours plus loin la captation de la lumière, du mouvement et l’exploration des sensations en alliant technique et esthétique.   C.C.

 

R​éférences documentaires des captures d'écran : 

L-'Œil, le Pinceau et le Cinématographe : naissance d'un art. Documentaire réalisé par Stefan Cornic, coproduit par ARTE France, Beall Productions, Musée d’Orsay et de l’Orangerie. France, 2021, 53 minutes.

Contexte de réalisation et de diffusion du documentaire : Exposition du musée d'Orsay "Enfin le cinéma ! Arts, images et spectacles en France (1833-1907)", du 28 septembre 2021 au 16 janvier 2022 (commissaires d'exposition : Paul Perrin, Dominique Païni et Marie Robert).

- Lumière ! L'aventure commence. Documentaire réalisé et commenté par Thierry Frémaux, coproduit par Centre national de la Cinématographie, Thierry Frémaux, Bertrand Tavernier, Maelle Arnaud, France, 2017, 90 minutes. 

Prochaine rencontre avec Les Arts 57 :

Jeudi 13 Juin à 20 h,

au Château Fabert, à MOULINS LES METZ.

« Edward Hopper »

Soirée présentée par M. Jean-Yves BEGUE.

Réservation obligatoire par mail ou par tél.

 lesarts57@gmail.fr   ou tél.   03 87 32 05 03 

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 Nous programmons au moins quatre rencontres par an et organisons deux  à trois visites guidées en fonction des événements culturels  dans la Région.

 

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